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Encore un grand cru pour Laurent Gaudé. Dans ce roman, l'auteur nous parle à travers plusieurs narrateurs qui sont tous d'une manière ou d'une autre, et parfois contre leur gré, impliqués dans une guerre qui a marqué notre histoire. On voyage donc dans le temps et l'espace en se retrouvant tantôt avec le capitaine Grant dans les dernières batailles de la guerre de Sécession, tantôt aux côtés d'Hannibal et de ses éléphants lors de leur marche vers Rome ou encore au cœur du commando américain qui a assassiné Ben Laden, ou de Daech.
Dès que l'on s'est habitué à l'alternance très fréquente des narrateurs (chaque paragraphe marque un changement de personnage), on est emporté par l'écriture magistrale de Laurent Gaudé, sans un accroc. Et à travers ces récits, c'est évidemment une belle réflexion sur l'histoire de notre civilisation qui nous est offerte. Qui est vraiment le vainqueur lorsque des milliers de jeunes partent au combat ? Toutes ces guerres ne produisent-elles pas que des perdants ? Quels sont les vestiges de notre histoire ? Faut-il les préserver envers et contre tout ? Et pourquoi certains groupes s'acharnent-ils à détruire ces traces ?
Catherine M
Paru en août 2016 - existe aussi en format numérique.
Mariages arrangés, enfants illégitimes, projets de vengeance, Venise, Berlin, ruée vers l'or... Voici quelques ingrédients du dernier livre de Vincent Engel. L'histoire démarre chez un notaire avec une mystérieuse mission confiée à un jeune Italien qui a grandi en pleine campagne. Dès le départ, on sent que l'histoire de cet étrange héritage est tortueuse et, alors que beaucoup d'éléments sont déjà révélés dans une longue lettre qui constitue le début du livre, Engel continue à nous surprendre tout au long du roman jusque dans les dernières pages.
On va voyager dans l'Italie du 19ième siècle, à Venise, Milan, en Toscane mais aussi à Berlin, New-York, San Francisco. Le roman peut se lire indépendamment du reste de l’œuvre de Vincent Engel, mais les lecteurs de Retour à Montechiarro retrouveront le destin de Laetitia et Raphaël. Voici donc une très bonne saga familiale où passions, trahisons, rêves de liberté se mélangent efficacement.
Catherine M
Paru en mai 2016, existe aussi en format numérique.
"Le grand jeu" raconte l'histoire d'une retraite en montagne dans un récit émouvant et poétique. Tout au long du roman, des éléments pragmatiques liés à l'organisation de la vie quotidienne en solitaire et en montagne s’entremêlent avec des réflexions plus philosophiques et le récit des découvertes que fait la narratrice au fil des jours. Découvertes qui évoquent la montagne dans toute sa splendeur mais qui peuvent aussi être parfois très surprenantes. En effet, elle semble ne pas être seule sur ce coin de rocher qu'elle croyait complètement désert.
Minard nous surprend et divise les libraires, les critiques, les lecteurs qui ne savent quoi penser de ce nouveau roman. Moi je l'ai adoré, lu presque d'une traite. Il m'a transporté dans un univers montagneux que j'admire et vénère. Il plaira, je pense, beaucoup aux amoureux de la montagne... les autres pourraient s'ennuyer.
Catherine M
Paru en août 2016 - existe aussi en format numérique.
Karine Tuil s'empare de questions qui bousculent et questionnent le monde d'aujourd'hui et la société française en particulier. Elle le fait avec brio et sur un rythme enlevé, voire endiablé, qui rend palpitante la lecture de ce roman par ailleurs électrique et efficace.
Une jeune journaliste déboussolée, un richissime patron de groupe multinational, un éducateur devenu conseiller du président français, un soldat traumatisé par l'Afghanistan : nous plongeons d'emblée dans les sujets qui passionnent les médias des années 2000.
Le propos de l'auteur est aussi d'interroger l'obsession pour les identités : quand est-on raciste aujourd'hui ? Comment étiquetons-nous les autres et nous étiquetons-nous nous-mêmes au XXIème siècle en Europe occidentale ? Les personnages du roman vont tantôt revendiquer tantôt rejeter comme non avenues les identités qui leur collent à la peau et le roman nous renvoie la question de leur pertinence : "Noirs" ? "Juifs ?" "Musulmans ?" Qu'est-ce que ça signifie à Paris en 2016 ? Peut-on échapper au verdict médiatique en la matière ?
L'insouciance nous fait aussi le cadeau d'une belle trame romanesque et d'un joli plaisir de lecture.
Natacha
Paru en août 2016 - existe aussi en format numérique.
Adélaïde de Clermont-Tonerre nous offre un de ces livres qu'on ne peut lâcher et qui donne tout son sens au plaisir simple de la lecture. Dans cette saga habilement construite, l'auteure nous emporte dans un récit palpitant, entre le Manhattan enjoué de la fin des années soixante et le Dresde en ruines de la fin de la Seconde Guerre mondiale. On tremble, on palpite, on tourne les pages avec frénésie pour essayer de découvrir les liens qui existent entre ces deux mondes et ces deux époques. De sa plume vive et enjouée, l'auteure réussit son pari de nous tenir en haleine du début à la fin avec ce roman doté d'un grand souffle.
Delphine
Août 2016 - Existe aussi au format numérique
La chaleur, les odeurs, la nature tout entière avec sa boue, ses insectes, ses humains empêtrés et indissociablement liés à la vie animale dont ils procèdent, tout cela nous accueille d'emblée dans ce roman puissant et marquant de Jean-Baptiste Del Amo.
D'abord, la vie d'avant la première guerre avec son travail rude, ses silences, sa lutte constante pour la survie. Puis la guerre qui casse et prend des vies. Ensuite, les années 80 et la brutalité de l'élevage industrialisé.
Dans ces deux grandes périodes, on rencontre cinq générations d'une même famille dont le sort est lié à celui des porcs par un noeud secret mais aussi par tradition et par nécessité. Les humains et les animaux semblent en perpétuel équilibre instable, les hommes essayant sans cesse de dominer la vie qui reprend le dessus sous toutes ses formes, des plus effrayantes et abjectes aux plus folles, indomptables et libres.
Lisez ce livre porté, de plus, par une écriture richissime !
Natacha
Août 2016
Claude Pujade-Renaud est une grande romancière française, qui nous avait déjà entraînés dans la vie de Saint-Augustin dans son précédent roman. Dans celui-ci, c'est la vie de Soren Kierkegaard qui sert de point de départ, et c'est plus particulièrement la vie amoureuse de ce philosophe danois du 19ème siècle qui est la porte d'entrée du roman. Régine, la première narratrice, fut la première (et seule) fiancée de Kierkegaard, mais ce dernier rompt les fiançailles quelques semaines avant le mariage. Cet événement va plonger Régine dans une profonde tristesse et une incompréhension de ce choix. Elle va cependant, quelques années plus tard, rencontrer Frédéric, jeune diplomate danois prometteur, qu'elle épouse et avec qui elle part aux Antilles. Lorsque, des années et années plus tard, Kierkegaard décède, c'est Régine qui sera sa seule légataire.
Pujade-Renaud nous plonge dans une époque. On voyage entre les Antilles et la ville de Copenhague, au cœur de la bonne société danoise érudite. Avec beaucoup de finesse, c'est ainsi la pensée de Kierkegaard qu'on approche. Une lecture tout en finesse, qui nous amène à voyager, à réfléchir, à imaginer... un roman vraiment excellent !
Catherine M
Avril 2016 - existe aussi en format numérique.
Quel condensé d'émotions dans ce beau texte de Carol Vanni ! Des voix surgissent pour évoquer l'attente. Textes courts pour des attentes longues, tantôt fébriles, tantôt sombres, amusées, infinies ou brutalement interrompues. Chaque texte est plein, fini et nous touche : Carol Vanni nous offre une chute à chaque page.
Dans chaque texte, c'est une autre voix qui se fait entendre et cependant, un fil conducteur insaisissable se dessine. Les temps forts d'une vie se succèdent dans le désordre. Des naissances, des morts, des amours qui commencent ou finissent, des moments d'enfance. Entre les vagues, le lecteur reprend son souffle pour être témoin de l'attente toute simple d'un enfant dans une voiture au supermarché, ou même d'objets du quotidien, sans perdre un instant de sa densité. La tension dramatique se desserre alors pour mieux revenir d'un seul coup, juste après. Car chaque texte nous concerne au plus près, aucun ne nous laisse indifférent.
Chaque texte parle de nous.
Les peintures graves et silencieuses de Véronique Decoster entrent superbement en dialogue avec les voix des Pénélopes, au sein d'un livre qui s'inscrit joliment dans le beau travail éditorial de l'Esperluète.
Carol Vanni lira des extraits de son livre et répondra à vos questions chez Papyrus le 3 mars à 19h30.
Natacha
Une histoire d'amour fou où le quotidien est sublimé par mille poésies fantaisistes, mille aventures imaginaires, le tout arrosé de cocktails enivrants ! Une danse effrénée à la vie, entre tristesse et sensualité, au rythme du "Mr Bojangles" de Nina Simone. Un premier roman captivant et tourbillonnant, qui rappelle que la folie n'est pas l'apanage des seuls "désaxés" et que l'amour permet tout !
Catherine D.
Janvier 2016
Hubert Antoine est d'origine namuroise, désormais exilé au Mexique. C'est sur sa nouvelle terre d'accueil que ce premier roman surprenant et passionnant prend place.
Melitza est une jeune Mexicaine de 23 ans que nous allons apprendre à connaître à travers ses carnets de notes, sorte de journal intime. Orpheline de mère depuis sa naissance, elle a été élevée par son père excentrique mais aimant qui lui a transmis une série de valeurs sociales et le goût de la vie. Un soir, elle est sera victime d'un terrible viol et va être amenée à fuir après le meurtre de ses agresseurs.
Le roman nous entraîne dans la fougue de le jeunesse de Melitza, à travers ses émois, ses amours, ses envies, ses rêves, beaux et naïfs aussi. Mais c'est aussi le Mexique qu'on découvre, la richesses de sa culture et de ses traditions, c'est une vraie ode à ce pays à la fois magique et terriblement violent, corrompu, inégalitaire, un pays qui ensorcelle.
Comme souvent aux éditions Verticales, la plume de l'auteur est belle, fluide, entraînante, sans accro. On est littéralement porté par le texte, sans effort. Et on est balloté entre la légereté de la jeunesse de Melitza et les évènements tragiques de sa vie. Un texte à la fois intime et politique, à découvrir assurément.
Catherine
Janvier 2016 - également disponible en format numérique.
Comment l'arrière-petite-fille d'un certain Joseph Davrichewy, camarade et "presque" frère de l'autre Joseph, Staline, nous replonge dans la Géorgie du début du XXe siècle, et dans l'histoire de la révolution russe.
Un récit étonnant, porté par la fascination de l'auteure pour son arrière-grand-père, et son amour pour son père, qui nous fait découvrir un bouillonnant Staline, dans la force de la jeunesse, et un intrépide arrière-grand-père au caractère bien trempé.
Un roman touchant sur la mémoire familiale.
Delphine
Janvier 2016
Lyonel Trouillot est un grand auteur haïtien qui entraîne régulièrement ses lecteurs aux confins de l'âme humaine, mais aussi, à la recherche de l'âme des lieux, des quartiers, des rues...
Dans son dernier roman, on découvre cinq "amis" (Popol, Joëlle, Sophonie, Wodné, et le narrateur) qui résident à la rue de l'Enterrement, rue qui mène au cimetière de la ville. Le lieu peut sembler misérable si l'on s'en tient aux revenus de ses habitants mais la rue abrite en réalité des gens emplis de conviction, de rêve, de soif de savoirs, des militants, des sages aussi (Man Jeanne, Le "petit professeur"). Bref des gens non moins valeureux (au contraire) que les hommes politiques ou les humanitaires qui envahissent le pays. Les cinq amis de la rue de l'Enterrement grandissent en empruntant des chemins différents qui les éloignent les uns des autres. L'une d'entre eux travaille au "Kannjawou", un mot qui signifie fête et partage dans la culture traditionnelle haïtienne mais qui est aujourd’hui le nom d'un bar branché où se retrouvent les expatriés et les nantis de l'île. Le "Kannjawou", c'est le symbole de la déroute du pays.
Dans ce pays qui souffre tant et où la frontière entre le monde des morts et celui des vivants semble toujours si ténue, quel avenir les jeunes de la rue de l'Enterrement peuvent-ils entrevoir? Trouillot nous monte qu'Haïti est pleine de ressources, que ses habitants sont prêts à prendre leur destin en main mais qu'ils sont pris en tenaille entre la corruption des hommes au pouvoir, l'aide humanitaire qui amène ses propres manières de fonctionner en empruntant à la culture locale ce qui l'arrange. Ces éléments détruisent la solidarité du peuple qui semble pourtant prêt à se battre pour son avenir.
Catherine M
Janvier 2016 - existe aussi en format numérique
Quelques liens pour en savoir plus
On ne sort pas indemne de ce roman, bouleversant, cruel et tendre à la fois.
Sorj Chalandon y raconte son enfance auprès d’un père violent et mythomane, et d’une mère effacée. Mais l’intention de Chalandon n’est pas d’apitoyer le lecteur sur son sort d’enfant battu, et le ton n’est pas larmoyant. Loin de là. Suite au décès récent de son papa, il a en effet décidé de raconter ses blessures d’enfance, afin de mieux les cicatriser.
Il raconte les délires et la violence de son père, dont il ne connaîtra jamais la profession, mais qui était à ses yeux un incroyable agent secret, ce père qui l’entraînera toute sa jeunesse à devenir soldat d’une association secrète, en vue de l’assassinat du Général De Gaulle. Il raconte sa mère, maltraitée, passive face à ces violences, l’ombre d’elle-même, dans un réel déni de la maladie mentale de son époux. Il racontera aussi comment tous ces mensonges le faisaient aussi rêver au destin fabuleux de son père… A 12 ans, on ne remet pas en question les paroles de son papa.
Sorj Chalandon nous touche aussi particulièrement dans la seconde partie de son roman quand on découvre son double autobiographique, Emile, essayant de renouer contact avec ses parents après des dizaines d’années de salvatrice et nécessaire prise de distance. On y sent toute la tendresse d’un homme qui essaye d’oublier, de tourner la page, de tendre la main malgré tout.
Profession du père est un récit conté d'un rythme soutenu, intime, mordant, un vrai coup de poing. Un livre qui ne laissera personne indifférent.
Delphine
Septembre 2015
Nous sommes en république Tchèque, en 1941, où on assiste à la déportation de nombreuses familles vers le ghetto de Terezin. A travers une langue d'une grande richesse, l'auteur nous offre une ambiance, une atmosphère, des visages, des gestes et nous entraîne au cœur du ghetto. On partage la vie d'une homme pendant environ deux ans, une vie de pauvreté, de misère, de tristesse mais où des rayons de soleil, des gestes de solidarité, de complicité parviennent à percer la noirceur quotidienne. Un texte court, vif et poétique qui happe le lecteur.
Catherine
Septembre 2015 - disponible également en format numérique.
Virgil, Chancal, Assan, Iman fuient la guerre, la violence, la misère... Tantôt brutalement, parfois délicatement, on découvre leurs histoires sous la plume de Pascal Manoukian, ça retourne les tripes, ça secoue, ça perturbe nos univers douillets.
Au fil du livre, le quotidien dur et cruel des réfugiés et migrants en Europe est décrit. Une terrible scène nous amène sur un parking, à la fine pointe de l'aube, dans la banlieue parisienne. Les camionnettes passent chercher la main d’œuvre nécessaire pour la journée, on négocie (ou pas) les prix, les tâches, les conditions de travail. Si on est seul, non intégré dans une communauté, un réseau, c'est l'exploitation assurée...
Ce premier roman nous a particulièrement touchées. Le texte bien construit nous entraîne au cœur des vies de chacun de personnages. L'auteur dépeint une réalité amère et âpre mais il nous montre aussi que des petits gestes, des rencontres, peuvent changer la destinée. Une texte à découvrir sans hésiter, tant pour son contenu (malheureusement terriblement actuel) que pour la plume de l'auteur qui tient son lecteur en haleine tout au long du roman.
Catherine
Août 2015 - existe aussi en format numérique.
Intriguée depuis longtemps par la famille Mendelssohn, par Moses Mendelssohn, le penseur humaniste du XVIIIe siècle épris de libertés et par Félix Mendelssohn, le grand compositeur romantique, Diane Meur s'est finalement lancée dans l'aventure et attaquée à un travail de longue haleine, celui de dresser le portrait de cette immense famille, et d'en dessiner avec précision la "carte généalogique". L'ouvrage tient ses promesses en nous livrant une peinture historique foisonnante et pointilleuse de la grande communauté des Mendelssohn, depuis l'époque de Moses jusqu'à nos jours. Mais c'est finalement davantage le témoignage de l'auteure, Diane Meur elle-même, qui s'y met en scène et qui s'y livre, qui touchera le lecteur. L'écrivain s'y raconte comme souvent dépassée par l'ampleur de son sujet, parfois perdue dans cet arbre généalogique tentaculaire, mais toujours passionnée par ses recherches... et le roman devient celui de son enquête, entre Paris et Berlin.
La carte des Mendelssohn est un ouvrage érudit pour les amateurs d'histoire qui y verront comment de multiples influences peuvent métisser l'histoire d'une famille à travers les siècles. C'est surtout un récit touchant sur le travail de création où l'auteure se livre avec beaucoup de sincérité et une salutaire dose d'humour.
Delphine
Août 2015
Delphine de Vigan qu'on ne présente plus, (chacun se souvient des Heures souterraines et Rien ne s'oppose à la nuit), nous livre un roman d'une habileté diabolique, qui nous tient en haleine de la première à la dernière ligne.
Elle soumet en même temps à la réflexion du lecteur des questions majeures : le rapport entre le réel et la littérature, de même que celui qui unit (voire oppose) la réalité et la vérité.
"Ce pourrait être un projet littéraire, écrire un livre entier qui se donnerait à lire comme une histoire vraie, un livre soi-disant inspiré de faits réels mais dont tout, ou presque, serait inventé".
Véronique B.
Août 2015
L'empereur Charles Quint renonce à tous ses titres: il abdique. Le roman nous dépeint les mois durant lesquels il se défait du pouvoir et transmet à d'autres, non sans un certain soulagement, les responsabilités qui ont fait de lui l'homme le plus puissant du monde. Il va ensuite se retirer dans le monastère de Yuste, isolé dans la montagne.
Dans ce climat de dépouillement progressif où il assiste aux échecs de son fils et où le pouvoir semble peiner à se détacher de lui, il garde cependant l'esprit en éveil dans un domaine qui l'a toujours passionné: les horloges et leurs mécanismes. Une horloge astronomique en particulier va maintenir sa curiosité en alerte car il ne comprend pas son fonctionnement, différent des autres. Et notre curiosité à nous restera en alerte aussi jusqu'au terme du roman, où le mystère de l'horloge se dévoile.
Amélie de Bourbon Parme imagine mois après mois l'état d'esprit de l'empereur, puis de l'ex-empereur qui, souffrant et las mais aussi parfois impatient et tortueux, porte un regard désabusé sur son entourage et aspire à la retraite, au calme et à préparer sa mort, le tout portant un éclairage particulier sur son règne.
Outre son intérêt historique, Le secret de l'empereur est un superbe portrait d'homme, portrait politique, humain et philosophique, qui capte et retient notre attention tout le long du récit par ailleurs très bien construit.
Natacha
Août 2015
Un livre âpre et fort où l'on rencontre un homme, Daniel Avner, hanté par la disparition de sa famille dans un camp. Dès la fin de la guerre, son grand-père, lui aussi rendu fou par la perte des siens, lui imprime sa propre souffrance.
C'est l'histoire d'une impossibilité à habiter son corps, d'une culpabilité qui vide le corps de son existence, et de la rencontre qui redonnera à Daniel un peu de sa chair, non sans remous. C'est l'histoire de l'Histoire qui plie et tord les individus, les marque à vie et les rend fous. L'écriture de ce premier roman mérite d'être saluée pour sa justesse et sa qualité. C'est un roman dont on sort marqué, changé, éclairé sur l'humain, après être passé par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel, car Elena Costa excelle à nous faire vivre presque physiquement les états de son personnage, et c'est assez terrible.
Natacha
Rentrée littéraire - août 2015
Comment raconter la vie, le sens de la vie, le sens d'une vie ? Par les histoires, par tout ce que nous aimons, l'intime du récit, l'équilibre inespéré entre celui qui dit et celui qui écoute, tous ces liens... Rien ne semble grave et pourtant, le destin peut basculer sur quelques mots. Lisez « La Source », une très belle histoire. Lisez la source une très belle histoire de secrets partagés entre Lottie, 90 ans, et la narratrice, jeune sociologue qui n'est certainement pas venue par hasard dans ce hameau proche de Langres...
Véronique
Août 2015
Nous sommes en 2037, Antoine sort de prison après 20 ans de détention et foule à nouveau les trottoirs de Paris. Ancien révolutionnaire criminel, il va redécouvrir le monde tel qu’il est devenu : pas si différent de celui que nous connaissons aujourd’hui, un peu plus technologique, un peu plus violent surtout. Après 20 ans d’isolement, il va aussi apprendre à renouer des relations humaines : avec des voisins de la cité Molière, avec ses nouveaux collègues, avec sa fille, qui semble elle aussi portée par sa volonté de changer le monde, radicalement. Mais de manière plus pacifiste que son père à l’époque…
Dans ce récit d’anticipation habilement mené, Denis Lachaud nous interpelle sur notre société, et ses possibles dérives futures. Inspiré de l’actualité brûlante du moment, l’affaiblissement de l’Europe, l’endettement de la Grèce ou de l’Espagne, l’augmentation de l’immigration et le manque criant de place pour les migrants, les mouvements révolutionnaires populaires qui se soulèvent un peu partout, ce futur qu’il nous décrit nous paraît crédible, et nous fait sans doute un peu peur par sa radicalisation. Mais Denis Lachaud trouve un ton juste et sincère qui n’est ni moralisateur, ni culpabilisant, mais plutôt volontairement utopiste, fantaisiste, parfois drôle, un ton percutant qui fait mouche.
Un roman qui donne à penser, sans se prendre trop la tête. Qui donne à rêver surtout à un autre monde. Et rien que pour ça, sa lecture en vaut le détour.
Delphine
Août 2015
Dans un Congo chahuté où la rivalité entre les ethnies et les jeux de pouvoir font la loi, Moïse, dit Petit Piment, appelé ainsi suite à un acte de bravoure, est un gamin qui, à 13 ans, n'a jamais connu que l'orphelinat de Pointe-Noire. Bien décidé à vivre sa vie, laissant derrière lui son meilleur ami, il décide de fuir et côtoie une jeunesse borderline. Jusqu'au jour de sa rencontre avec Mama Fiat 500 qui tient une maison de passe et le prend sous son aile. Ce seront des années heureuses pour Petit Piment... mais une décision municipale mettra à néant tous ses rêves de futur.
Emouvant, parfois drôle, Petit Piment symbolise la jeunesse africaine orpheline prête à tout (et à tous les sacrifices) pour exister.
Véronique B.
Août 2015
... "Ma voix elle vaut rien devant celle du colon - C'est parce que les Français ils disent qu'ils ont la prépondérance - C'est quoi, la prépondérance ? - C'est quand tu prépondères - Qu'est-ce que ça veut dire ? - C'est quand tu as les mitrailleuses et les Sénégalais - Les Français, ils disent que tu es prépondérant quand tu es plus civilisé - Plus civilisé ?..."
Voici un roman à rebondissements, conté d'un rythme soutenu et sur un ton moqueur.
Nous sommes à Nahbès, ville imaginaire, entre 1922 et 1924, une ville coupée en deux par un lit d'oued, très raviné... la rive gauche, la rive droite, la ville indigène, la ville européenne. Quand des Américains débarquent afin d'y tourner un film, "Le guerrier des sables", la petite ville est en émoi. Bruyants, d'allure frivole, surtout les femmes dont "les robes laissaient voir beaucoup de chair" et "qui s'installaient sans hommes à la terrasse des cafés", ils perturbent le monde policé des prépondérants, d'autant plus que les Américains "copains avec tout le monde, un officier à particule ou l'épicier Ben Machin, c'était quand même insultant... il y en avait même qui s'étaient mis à apprendre l'arabe... et les bicots, ils s'y croyaient déjà ". Mais la petite communauté américaine est aussi perturbée par une affaire qui défraie la chronique, là-bas, chez eux, dans le monde du cinéma, une histoire de viol suivie d'un décès.
Dans tout ce méli-mélo, on s'attache à Raouf, le fils du caïd Si Ahmed, bachelier doué qui a fréquenté le lycée français. Raouf rêve de liberté, de justice et d'indépendance. Raouf et Ganthier, un riche colon, effectueront "le grand voyage" qui les mènera de Paris à l'Allemagne. Belkhodja, commerçant prétentieux, aux rêves de grandeur, finira acculé par des dettes qui fera dire à un prêteur : "Quand la fête est finie, il ne reste que du linge sale".
On croisera la route d'un trio de femmes aux caractères bien trempés : Kathryn, une actrice américaine, Gabrielle Conti, une journaliste française et Rania, jeune veuve, intellectuelle, "sculpturale, des yeux en amande" qui a le goût des livres, lisant l'arabe et le français.
On pourrait dire encore beaucoup de choses sur cet excellent livre... notamment qu'on ne s'y ennuie pas une seconde.
Véronique B.
Août 2015
Etienne est photographe de guerre. Il a passé plusieurs mois enfermé, pris en otage dans un pays en conflit. Otages intimes, c'est l'histoire de son retour à la vie libre, retour qui ne coule pas de source et s'accompagnera d'autres douloureuses ou heureuses libérations. Car c'est peut-être le principal sujet de ce roman beau et touchant qui porte si bien son titre: les délivrances intérieures des autres personnages répondent à celles d'Etienne et en refermant le livre, le lecteur lui-même a l'impression d'avoir dénoué certains de ses liens. Otages intimes, c'est aussi une plongée dans la nature, une belle méditation sur l'enfance et un portrait de mère qui ne laissera pas indifférent... Si vous avez aimé Profanes, vous retrouverez avec bonheur l'écriture fine et sensible de Jeanne Benameur pour un livre qui, tant par le choix du sujet que par son traitement, égale largement le précédent.
Natacha
Rentrée littéraire - août 2015
Pourquoi se priver d'un voyage ailleurs, en Guinée Bissau grâce au talent de Sylvain Prudhomme ?
Printemps 2012, un jour apparemment comme un autre débute, pour Couto, merveilleux musicien du groupe mythique Super Mama Djombo, par une terrible nouvelle, la mort de Dulce, son premier amour, la chanteuse du groupe. La journée se passera pour lui en souvenirs mais aussi en rencontres, la ville bruissant de rumeurs précises sur la préparation d'un coup d'état...
Musique, politique, amours se mêlent dans ce récit captivant et très agréable à lire grâce à une écriture simple et belle.
Véronique