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Merveilleux écrivain que Ruiz Zafon qui, une fois de plus, clame son amour pour Barcelone, ville chargée d'Histoire.
Le roman couvre la période franquiste depuis la guerre civile. L'héroïne, Alicia Gris, alors petite fille, est blessée gravement, sous les bombardements de Mussolini, venu appuyer Franco. Des années plus tard, devenue une femme au caractère trempé et rongée par son passé, Alicia travaille au "Corps", sorte de police parallèle. Aidée par l'inspecteur Vargas, elle va enquêter sur la disparition d'un ministre et sur une liste de chiffres bien mystérieux, dont l'explication dévoilera une des pages les plus sombres de la période dictatoriale, lorsque opposants politiques, artistes, écrivains étaient enfermés dans la tristement célèbre prison-forteresse militaire de Montjuic.
Ces pages ne font pas de ce roman un livre triste. Pour les lecteurs de "L'ombre du vent", on y retrouve Daniel, devenu adulte et père à son tour, ayant à charge aujourd'hui la librairie Sempere, Fermin, au langage fleuri, toujours conseiller littéraire de ladite librairie, et la magie du cimetière des livres oubliés...
Si les quatre tomes de la série du "Cimetière des livres oubliés" (L'ombre du vent - Le jeu de l'Ange - Le prisonnier du ciel - Le labyrinthe des esprits) forment un tout, si des liens sont tissés entre eux, chacun peut se lire indépendamment ou dans le désordre.
L'écriture jouissive, le récit à rebondissements, l'Histoire avec un grand H, font de cette lecture un grand moment de plaisir, une célébration de la littérature, une lecture qu'on a envie de partager.
Véronique
Paru en mai 2018, traduit de l'espagnol par Marie Vila Casas. Existe aussi en format numérique.
Aurélie et son petit frère Christophe prennent la plume ensemble pour nous livrer un bout de leurs enfance/adolescence sur fond de terrils dans la région liégeoise. Les chapitres s’alternent et l'on retrouve une fois la voix de la sœur, une fois celle du frère. L'écriture à deux (ou quatre ?) mains est une vraie réussite. Ils réussissent à nous faire percevoir deux points de vue, sans que l'on soit dérangé pour le changement de narration.
On plonge donc avec eux dans cette campagne où l'aventure côtoie l'ennui. Venant d'une famille traditionnelle chrétienne, la marge de manœuvre des narrateurs n'est pas énorme et la messe du dimanche est un rendez-vous incontournable. Mais au fil des années, les sorties avec la bande du village vont se multiplier et les enfants gagneront petit à petit un peu de liberté. Premiers émois, premières disputes avec les parents, les enfants grandissent et dans ce récit du quotidien, surgit un drame qui ébranle tout le village...
Un livre teinté de pas mal d'humour malgré une ambiance un peu moite et noire également. Des auteurs à suivre assurément.
Aurélie Levaux est également auteure-illustratrice de romans graphiques.
Catherine M
Paru en mars 2018.
Dans cet ouvrage, Florent Loiseau nous dépeint une situation relativement précaire et dramatique, avec pourtant beaucoup d'humour. C'est l'histoire de Fred, un jeune homme qui accumule les petits boulots, dont la banquière réclame le remboursement de ses emprunts et qui vient de se faire licencier... Bref, une situation non enviable. Acculé financièrement, il accepte un nouveau job mal payé, il devient accompagnateur pour une compagnie privée pour assurer un service de nuit sur la ligne ferroviaire qui relie Paris à Venise. Et le voici qui s'embarque pour une aventure haute en couleur. Ce train a des allures de cour des miracles, il transporte des touristes mais aussi des migrants, et le personnel qui y travaille fait preuve de beaucoup de "créativité" pour améliorer les fins de mois. C'est le règne de la débrouille, de l'arnaque.
Finalement sous ses allures un peu foutraques, Paris-Venise est une lecture vraiment instructive et intéressante qui nous permet de découvrir un microcosme particulier et qui nous parle aussi du monde du travail et de ses petits boulots précaires. Par ailleurs, le côté anti-héros et l'autodérision du narrateur en font aussi une lecture ludique et amusante, car pleine d'humour.
Catherine
Paru en février 2018
Quel beau texte! Une écriture maîtrisée, fluide, belle, travaillée mais sans fioriture, un vrai bijou littéraire, porté par une histoire qui tient le lecteur en haleine.
Deux jeunes amoureux, mariés depuis quelques années, sans enfant, passent le dimanche après-midi en forêt. Nous sommes dans les années 1950, dans un milieu modeste, ils viennent de s'acheter deux beaux vélos flambants neufs. Après un petit pic-nic, ils s'endorment dans une petite clairière éloignée du chemin... mais sont éveillés un peu plus tard pour une petite odeur de brûlé. La forêt a pris feu.
Petit à petit le feu s'étend et il devient difficile de le maîtriser. Tandis qu'ils tentent de l'éteindre et de fuir (avec leurs vélos sur le dos car on ne va quand même pas les abandonner), un dialogue s'installe entre les deux amants revenant sur leur histoire et sur de vieilles rancœurs. L'adversité les place face à face et nous donne un spectacle palpitant tout à la fois de leur fuite et de leur couple.
Catherine M
Paru en avril 2018
Voici un roman, et non une biographie, qui met en lumière la vie et le travail du peintre anglais toujours vivant David Hockney. Catherine Cusset nous entraîne à travers la seconde moitié du vingtième siècle, de Londres à Los Angeles, de Paris à New York en passant par de longues vacances en Italie ou encore. On y suit le besoin irrépressible pour ce gamin élevé dans une famille ouvrière de dessiner, de jouer avec les couleurs, avant d'oser aller à contre-courant du modèle établi et de s'imposer comme un artiste à part entière, reconnu par ses pairs. Bien sûr, on y découvre également un David Hockney intime, amoureux de son art et amoureux de ses amants, un artiste qui s'est véritablement révélé en même temps qu'il découvrait la lumière et la chaleur de Los Angeles, généreux et colérique aussi, égocentrique mais attentif à ses amis dans le besoin. Le roman nous permet de contextualiser chaque tableau important et cette lecture a été un réel plaisir de (re)découverte de cette oeuvre monumentale qui a bénéficié l'été dernier d'une vaste et foisonnante rétrospective au Centre Pompidou de Paris.
A lire aussi bien par les connaisseurs que par ceux qui veulent découvrir autrement ce grand artiste contemporain!
Catherine D.
Paru en janvier 2018. Existe aussi en format numérique.
Bien sûr c'est une histoire qui n'existe pas, sur une île qui n'existe pas, avec des personnages qui n'existent pas mais tout le talent de Philippe Claudel est là; un matin trois cadavres sont découverts sur une plage de l'archipel du Chien, rejetés par la mer et sans doute tombés d'une de ces nombreuses embarcations qui fuient ce grand continent là-bas... et la fiction l'est beaucoup moins. Philippe Claudel est un formidable raconteur de fables, scrutant sans cesse l'âme humaine, ses idéaux tout comme ses compromissions... Que vont faire les habitants de ces corps, tout cela pourrait-il remettre en cause le calme de la petite île ainsi que le projet immobilier de luxe qui doit y voir le jour? Si les notables arrivent vite à la conclusion que tout cela doit être caché, n'avoir même jamais existé, tout le monde ne partage pas cette décision et l'arrivée d'un policier non insulaire va précipiter les évènements! Très bon, dans la même veine que le Rapport de Brodeck.
Gregory R.
Paru en mars 2018
La vie d’Eugenia nous fait traverser la Roumanie avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, moment où le profond ressentiment de la population envers les Juifs a donné libre cours à des actes d'une violence extrême, non seulement de la part des autorités établies mais également des habitants, des voisins, des anciens amis... Lionel Duroy ne nous parle donc plus de sa famille, ni de lui-même, mais plutôt d'un thème qui le touche et l'interroge: que l'on ait subi ces actes, que l'on y ait participé ou simplement assisté, comment vivre avec cela? Un sujet abordé avec cette volonté et ce souci particuliers de laisser aussi la parole aux "bourreaux", qui nous avait déjà touchés dans L'Hiver des hommes. Au travers de ses personnages, ce roman se trouve être une réflexion intéressante sur le rôle de la littérature et du journalisme (Duroy fut lui-même journaliste) face à la barbarie. Une lecture forte et belle!
Gregory R.
Paru en mars 2018
Plutôt réjouissant, ce deuxième tome de la saga de Pierre Lemaitre qui fait suite au roman "Au revoir là-haut", prix Goncourt 2013. Nous y retrouvons la famille Péricourt en 1927, à l'aube d'années sombres. Le roman s'ouvre sur une scène particulièrement marquante : le jour des obsèques de Marcel Péricourt, sa fille Madeleine va assister à un drame fracassant qui va bouleverser sa vie... Son fils, Paul, âgé de sept ans, chute du second étage et s'écrase sur le cercueil de son grand-père... Il survit à l'accident mais sera paraplégique pour le reste de sa vie. Madeleine Péricourt va hériter de l'empire financier de son père mais à défaut de le gérer, va rapidement se retrouver bernée par ses proches, ruinée et presque à la rue. Animée par un désir de vengeance, elle décidera de reprendre son destin en mains pour se reconstruire coûte que coûte.
A la manière d'un roman-feuilleton populaire mené tambour battant, Pierre Lemaitre nous entraîne dans une narration rythmée, enlevée, truculente. Il dépeint en une fresque foisonnante le monde des années 1920-1930, la montée des fascismes en Europe, la crise économique, la fin d'une époque dorée pour les grandes familles bourgeoises et aristocratiques, le monde cynique des banques et des affaires, les dérives de l'évasion fiscale. Un monde qui n'est finalement pas si éloigné de celui dans lequel nous vivons actuellement...
La comédie humaine que dépeint Pierre Lemaître est très amusante. Ses personnages sont hauts en couleurs, souvent caricaturaux mais bien campés. Il fait la part belle aux femmes dans ce roman, puisque ce sont des héroïnes qui vont tirer leur épingle du jeu dans un monde pourtant dominé par les hommes.
Pierre Lemaitre, très en verve, nous prouve une fois de plus qu'il est passé maître dans l'art de nous de nous tenir en haleine. Sa plume est vive, virtuose, son ton est incisif, son plaisir d'écrire est palpable à la lecture de ce roman dans lequel on s'ennuie pas une seconde. Un livre à dévorer en attendant un troisième opus...
Delphine
Paru en janvier 2018. Existe aussi au format numérique.
Voici un roman piquant à souhait ! Myriam Leroy nous raconte la vie d'adolescentes qui vivent au cœur du Brabant Wallon et qui seront, durant un temps, embarquées dans une amitié passionnelle. Cette relation bien que confortable par certains égards car elle donne à la narratrice une place au sein des jeunes de son école, va se révéler également cruelle et destructrice.
A travers cette histoire, on découvre ce coin particulier de notre Belgique, le Brabant Wallon, que Myriam Leroy dépeint avec cynisme parfois mais surtout avec beaucoup d'humour. Pour celles et ceux qui sont passés par Louvain-la-Neuve on y fait également une escale, et c'est rudement bien rendu, on s'y croirait.
Pour découvrir un extrait de ce livre lu par l'auteur, écoutez la jolie capsule sonore de SonaLitté.
Catherine M
Paru en janvier 2018. Existe aussi en format numérique.
On l'écoute à la radio, on lit ses chroniques sur papier glacé, on découvre ses pièces au théâtre et on est touché.e.s par sa sensibilité dans son tout nouveau roman Apprendre à lire. Premier roman dans lequel on ne retrouve pas forcément le ton incisif de ses chroniques, mais bien un patchwork d'éléments autobiographiques au service d'une histoire fictive à l'écriture âpre et sensible.
Apprendre à lire, c'est la chronique d'une relation perdue qui cherche à s'établir entre un père octogénaire, bourru et veuf, Sarde d'origine, émigré en Belgique pour travailler dans les mines, et un fils plus tout jeune, ordonné et tyrannique, directeur d'un grand organe de presse, heureux depuis 30 ans avec son compagnon et artiste reconnu Alex, et adepte du sexe sans amour avec des prostitués de passage. La rencontre aura lieu, peut-être, suite à la demande du père à son fils de lui apprendre à lire, pour ne pas arriver au paradis sans être capable de signer le registre... Face à cette requête inattendue, le fils va buter, ne pas comprendre, et puis, se lancer maladroitement, avant de jeter l'éponge et d'engager un jeune homme, amant de passage, qui se destine au métier d'instituteur et qui se propose pour aider le père, d'abord à lire et écrire, ensuite à commander et réchauffer ses repas et à accompagner l'apprentissage d'une balade quotidienne. On plonge dans le passé et l'enfance malheureuse du père par à -coups, on s'immerge dans le milieu superficiel et hype de la création artistique, on accompagne le narrateur dans son boulot impitoyable, bref on découvre un roman qui observe la vie quotidienne d'un père et d'un fils que tout oppose, avec en toile de fond la réalité de l'immigration italienne et de la classe ouvrière.
Voici le récit intime et touchant d'une relation père-fils compliquée, parsemée de non-dits et de violence retenue, un chassé-croisé filial désarçonnant et terriblement sensible. Un auteur à découvrir et à suivre!
Catherine D.
Paru en janvier 2017.
A travers la vie d'un homme ayant réellement existé, Wilfried N'Sondé nous emmène dans les pages les plus sombres de notre histoire. Cela donne un livre passionnant, terrifiant et terriblement humain.
Nsaku Ne Vunda, orphelin recueilli par des missionnaires sur les bords du fleuve Kongo sera un des premiers prêtres africains. Au tout début du 17ème siècle, il est invité à se rendre à Rome pour devenir l'ambassadeur de la région du Bakongo auprès du pape. Il débute alors un périple qui commence par la traversée de la savane en direction de la côte et qui va durer des années. Il embarque à son insu sur un navire chargé d'esclaves et qui, avant de se rendre à Rome, fait un détour par le Brésil pour y vendre sa cargaison. Lorsqu'il tente de retraverser l'Atlantique en direction de l'Europe, il sera la cible de pirates et finira par débarquer sur les côtes portugaises alors que l'inquisition bat son plein... Les épreuves qu'il traverse vont le construire et façonner sa détermination pour dénoncer les horreurs de l'esclavage. Parallèlement, ses rencontres le mèneront également à devenir "une voix porteuse d'amour et d'espoir", persuadé qu'il existe aussi "une passion d'amour entre les humains, celle qui transcende la vie sur terre en une expérience sublime".
Véritable roman d'aventures, ce livre nous embarque littéralement avec le héros de l'histoire sur ce navire chargé d'esclaves et ça retourne les tripes... En même temps, cette histoire nous rappelle qu'à toutes les époques (même les plus noires) il y a des monstres mais aussi des gens qui se battent pour dénoncer les injustices et humaniser nos sociétés.
L'écriture de N'Sondé est belle, poétique, chatoyante. C'est assurément un auteur à découvrir (si ce n'est pas encore fait : ceci est en effet son cinquième roman).
Catherine M
Janvier 2018
Charlotte, Emily et Anne Brontë nous ont légué certains des plus beaux romans anglais du XIXème siècle: Jane Eyre, Hurlevent, Agnes Grey (pour ne citer qu'eux) ont marqué leur époque et révélé ces trois sœurs au monde, d'abord sous leurs pseudonymes masculins, puis sous leurs vrais noms après la mort des deux plus jeunes, à l'âge d'à peine trente ans.
Dans cette biographie qui se lit comme un roman, Laura El Makki nous montre que les Brontë étaient davantage que des jeunes femmes célibataires et isolées dans leur presbytère du Yorkshire. Bien que très attachées à leur lande natale, ainsi qu'à leur famille, elles ont eu soif de découvrir le monde, et n'ont pas été épargnées par les drames de la vie.
Un très bon livre pour découvrir, sous un jour nouveau, cette sororité à l'immense talent.
Hélène
Paru en octobre 2017, existe aussi en numérique.
Derrière son apparence de femme tranquille et raisonnable, Jeanne cache une personnalité surprenante, aimant le hasard, vénérant une artiste totalement déjantée et peu conventionnelle. Comme elle le dit elle-même, « il y a deux Jeanne en moi, une qui a eu envie de cette vie calme et bien rangée et l’autre qui voulait être différente ». Avec des phrases courtes et simples, une écriture belle et délicate, Claudie Gallay nous parle du bonheur simple, des petits riens qui font du bien, de la beauté des choses quotidiennes ordinaires face à l’art particulier de la performance. Un roman accessible, sympathique, très agréable à lire.
Isabelle
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Quel beau premier roman! Dans Faux départ, on découvre une vrai plume, touchante, acerbe, piquante, teintée de jeunesse mais aussi déjà mature.
Aurélie, héroïne de ce roman, est à l'aube de sa vie adulte. Elle décode déjà fort bien les mécanismes de la société française qui rendent difficile son ascension sociale malgré le discours politique qui promeut l'égalité des chances. Aurélie vient en effet d'une famille ouvrière. On la suit dans ses études, ses petits jobs, ses errances, ses amours, ses galères... D'autres beaux personnages jalonnent ce livre : Alejandro, exilé colombien idéalisant son pays d'origine tout en ne voulant pas y retourner malgré la dureté de sa vie en France; Franck, quadra en mal d'amour; Benjamin qui semble apporter un peu de sérénité dans la vie d'Aurélie.
L'auteur nous livre aussi un portrait terriblement juste (et parfois cruel) de Paris aujourd'hui. C'est un roman à la fois intime et urbain, qui se lit avec fluidité. Une auteur à suivre.
Catherine M
Paru en septembre 2017. Existe aussi en format numérique.
Franz était enfant dans Abraham et fils, le voici adolescent dans Les histoires de Franz. Toujours observateur candide et lucide des années 60-70 dans la petite ville française imaginaire de Tilliers. Tilliers qui ressemble à Pithiviers.
Toujours avide de comprendre ce qui se passe autour de lui, il nous aide à comprendre les mouvements qui traversent ces années où l'émancipation, dans tous les domaines, est en ébullition.
Son papa, Abraham, devient directeur de la maternité. La nouvelle femme d'Abraham, Claire, crée avec deux amies un cercle pour informer les femmes sur la sexualité. Franz grandit et se trouve lui aussi confronté aux médecins, comme patient. On retrouve donc les thèmes chers à Martin Winckler : le soin, la médecine, la santé, l'autonomie. Et comme à chaque fois, l'auteur nous emporte dans son enthousiasme et dans une trame romanesque efficace, fluide, convaincue et convaincante.
On voudrait faire partie de cette famille où l'amour circule, on voudrait faire corps avec les enthousiasmes des personnages dans cette époque de découverte des libertés...
Ne boudez pas votre plaisir, rencontrez Franz et ses histoires qui sont aussi les histoires de France, avec le regard engagé et singulier que Martin Winckler, didactique et chaleureux, porte sur elles.
Vous pouvez rencontrer Martin Winckler à la librairie le lundi 23 octobre à 19h30. La soirée sera suivie d'une séance de dédicaces et d'un verre de l'amitié.
Valentine Goby, on la connaît pour ses romans (notamment Kinderzimmer et Un paquebot dans les arbres, édités par Actes Sud). Ici, elle nous plonge dans l'univers de Charlotte Delbo, écrivaine française, engagée dans la résistance et qui a vécu dans différents camps de concentration. Elle sera libérée à la fin de la guerre et écrira toute une série de romans relatant le vécu dans les camps. Elle meurt en 1985.
Charlotte Delbo fait partie des auteurs de littérature concentrationnaire, au même titre que Primo Levi, Imre Kertész et beaucoup d'autres. Elle sera pourtant longtemps méconnue du grand public. Est-ce parce qu'elle était une femme? Est-ce parce qu'elle semble avoir été heureuse après la guerre? Valentine Goby s'interroge sur ce personnage, sur sa vie après les camps, sur ce que la littérature permet pour survivre à ce genre de tragédie.
Je me promets d'éclatantes revanches est donc un essai littéraire mais se dévore comme un roman. En effet, on est aussi emporté dans l'enthousiasme de l'auteur vis-à-vis de cette femme étonnante. On chemine avec elle à la découverte de Delbo. Une petite pépite qui nous parle des pouvoirs des mots.
Catherine M
Paru en septembre 2017, existe aussi en format numérique.
Shell, du nom du blouson qu'il porte toute la journée (et parfois la nuit) sur le dos, est un garçon de douze ans, un ado pas encore ado et pas tout-à-fait comme les autres. Shell est différent, il a d'ailleurs quitté l'école. Il aime les tâches simples, répétitives, mais il a surtout envie de devenir un homme. Et un homme, ça fait la guerre. Alors, quand il entend ses parents, propriétaires de la station service où Shell est heureux de rendre de menus services, discuter un soir de son cas, il prend une grande décision pour ne pas être envoyé dans une institution qui, il en est sûr, ne lui conviendra pas. Il va partir à la guerre, là-haut, de l'autre côté de la colline et démontrer à ses parents qui il est vraiment! Mais de l'autre côté de la colline, c'est une autre surprise qui attend le jeune homme, c'est la plus belle rencontre de sa vie, il va découvrir sa Reine, une jeune fille qui va l'emporter dans un monde fantasque et imaginaire qui lui assurera confiance et sécurité, malgré la vie précaire qu'il va finir par mener...
C'est un roman tout en douceur, empreint de poésie dans son écriture et dans son esprit. C'est une ode à l'imaginaire, à la liberté, à la différence. Un roman qui parle d'apprentissage de la vie, avec le regard d'un enfant qui s'endort quand l'angoisse ou l'émotion est trop forte, ou encore un enfant qui continue de croire aux contes de fée, malgré la dureté de la vie réelle. Un conte initiatique, tout en sensibilité.
Catherine D.
Paru en août 2017, existe aussi en format numérique.
Gros coup de cœur. Pierre, qui s'était juré de ne jamais retourner en centre psychiatrique, fait une nouvelle crise et y est interné une seconde fois. Pierre est bipolaire et a arrêté de prendre ses médicaments. Le livre traite donc en partie de cette maladie, de son séjour dans le centre, des "branleurs de médecins" mais également du mal-être de ce jeune étudiant brillant qui est monté à Paris de son Ardèche natale, qui y est devenu journaliste (de gauche, lutte des classes oblige) et y a épousé une fille de la grande bourgeoisie parisienne (petite fille ou nièce de Paul Claudel, je ne sais plus...). Le style est tranchant et incisif et colle parfaitement au personnage de Pierre, cet écorché vif qui va devoir accepter sa maladie, mais qui va aussi aussi découvrir que les histoires que l'on raconte (ou que l'on tait) de génération en génération ne sont pas toujours vraies et qu'on n'en est pas les dépositaires éternels. Très beau personnage du père de Pierre...
Grégory
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Olivier Chantraine créa Serge Horowitz. Et il vit que cela était bon.
Personnage haut en couleurs, Serge Horowitz incarne l'image du quarantenaire à qui rien n'a jamais réussi, toujours en recherche d'un sens à sa vie : adepte du moindre effort, de la procrastination, vivant aux crochets de sa soeur dont il squatte l'appartement, hypocondriaque, et atteint de troubles d'aphasies chroniques qui lui font perdre toute capacité de parole à des moments de stress plus aigu, il est employé depuis de longues années par l'Offshore Investment Company, un cabinet de consulting international implanté à Paris. Et cela, grâce au concours de son frère, François, Ministre des Finances.
Et pourtant Serge Horowitz n'en est pas moins un personnage des plus sympathiques auquel le lecteur ne pourra que s'attacher. Au fil de nombreuses mésaventures et déconvenues décrites avec force humour par un auteur très inspiré, nous découvrons que Serge est aussi un homme de bon sens et d'idéaux. Lorsqu'il fait capoter le rachat d'une petite entreprise française par une société japonaise, pour avoir dit tout haut ce qu'il pensait de l'honnêteté de ce contrat, son frère, qui semble étonnamment lié à cette affaire, le somme de rattraper son erreur. Et vite fait. Mais Serge Horowitz a choisi la voie de la vérité, et non de la réussite sociale et professionnelle, et fera preuve d'une grande indépendance d'esprit. Il devient "un élément perturbateur", au désespoir de son ambitieux et peu scrupuleux frère qui vient d'annoncer qu'il se présentait aux élections présidentielles, et ne compte pas laisser son cadet entacher sa réputation.
Voici une satire sociale de notre société occidentale qui se savoure. Une comédie rythmée qui nous fait rire par ses dialogues acérés, le burlesque de certaines situations décrites, la modernité de son ton, totalement décalé.
Un moment de lecture jubilatoire !
Delphine
Paru août 2017. Existe aussi au format numérique.
Génialissime, original, littérairement travaillé ; voilà une histoire de piraterie et de chercheurs d'or qui sort de l'ordinaire. En effet, dès les premières pages, le récit du naufrage imaginaire du bateau du pirate Henry Morgan (1635-1688) capte notre attention et nous entraîne dans une contrée sauvage et mystérieuse, à la nature luxuriante.
Le roman, teinté de réalisme magique, nous présente auprès de personnages hauts en couleurs, originaux, dotés de caractères bien trempés. Plusieurs d'entre eux cherchent trois siècles plus tard le mystérieux trésor que l’équipage du capitaine Morgan aurait abandonné dans une région désormais agricole où la culture de la cane à sucre et le commerce du rhum ont fait la fortune de certains. Mais la richesse, la découverte de ce trésor, fera-t-elle leur bonheur ?
Le titre "Sucre noir" est une évocation au pétrole. Le Vénézuela (où l'auteur a vécu de nombreuses années) est en effet riche en pétrole, cela a-t-il fait pour autant le bonheur des citoyens de ce pays ? Rien n'est moins sûr. Et si cette découverte n'était pas à l'origine de leur perte justement ?
Avec ce roman d'aventures, Miguel Bonnefoy dresse une sorte de fable philosophique entraînante. Un auteur à découvrir assurément, qui sera présent à la librairie le mardi 28 novembre à 19h30 pour une rencontre qui s'annonce passionnante!
Catherine M
Paru en août 2017, existe aussi au format numérique.
C'est un moment dans la vie, c'est un retour, pour la narratrice, aux sources de son enfance, oubliées, enfouies dans sa mémoire.
Le nouveau livre de Julie Wolkenstein retrace la rencontre de deux chercheurs, Paul et Sophie, comme dans Les vacances de la comtesse de Ségur. Paul et Sophie s'intéressent justement à l’œuvre de Ségur et à l'adaptation, par le cinéaste Eric Rohmer, des Petites filles modèles, film qui n'a jamais vu le jour.
Un livre savoureux écrit par une plume légère et enjouée.
Véronique
Paru en août 2017, aussi disponible au format numérique.
Voilà un livre drôle, déroutant, désabusé, surprenant, ironique, voire cynique... bref un bouquin qu'on aime.
Dans ce roman, Olivier El Khoury nous dépeint le portrait d'un jeune en route vers l'âge adulte. Les réflexions du jeune "héros" de Surface de réparation oscillent entre celles d'un adolescent fatigué de devoir se construire une image aux yeux de son entourage et des pensées plus philosophiques sur la vie et le monde. Fan du club de Bruges, le narrateur n'est ni pour Anderlecht, ni pour le Standard, il n'est ni un Rouche, ni un Mauve.. mais il est quoi alors ? Il n'est pas tout à fait adulte, plus tout à fait enfant, il est entre deux. Il fait des études mais ne sait tout à fait pourquoi... Et finalement, est-ce un problème ? Faut-il toujours un fil conducteur clair dans une vie ?
Comme le héros du livre, on déambule dans ce roman, à travers des chapitres qui nous font voyager, qui sont parfois sans queue ni tête et c'est très bien ainsi. La plume est fluide, belle, tantôt rude, tantôt poétique.
Premier roman d'un auteur d'origine namuroise, Surface de réparation est une belle réussite et le nom d'Olivier El Khoury est assurément à retenir pour suivre la suite de ses aventures en littérature.
Catherine M
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Mercy, Mary et Patty, ou trois jeunes femmes qui ont osé défier la société bien-pensante dans laquelle elles ont été éduquées pour rallier la cause de ceux qui les ont kidnappées : les deux premières au XVIIe et XVIIIe siècle, la troisième au XXe siècle. Et c’est autour de cette dernière que les recherches menées par Gene Neveva, professeure universitaire américaine exilée pour un an dans les Landes françaises, et Violette (rebaptisée Violaine), son assistante française, vont se focaliser. Patty, pour Patricia Hearst, cette héritière de 18 ans qui sera enlevée par un groupuscule révolutionnaire en février 1974 et qui va progressivement embrasser leurs idéaux, jusqu’à manier les armes lors d’un braquage quelques semaines plus tard. En cavale, elle sera finalement arrêtée en 1975 et, en prévision du procès, les avocats du clan Hearst vont chercher à s’entourer de spécialistes en tous genres, dont Gene Neveva, avec la mission toute délicate de prouver que Patty (devenue Tania au sein du groupuscule) a subi un lavage de cerveau et qu’elle est victime du syndrome de Stockholm. C’est avec le regard tendre et naïf de Violaine que Neveva va revisiter toute cette affaire, cette même Violaine/Violette dont la vie va être à tout jamais bouleversée par cette quinzaine vécue en-dehors du temps. Les conclusions de Gene Neveva sont fortement attendues dans ce procès, car elle-même a tourné le dos à l’establishment et a acquis une certaine célébrité dans son pays…
Dans ce nouveau roman qui mêle subtilement réalité et fiction, il est question de rencontres, de liberté et d’emprisonnement, et à travers ces trois, voire six personnages féminins (féministes ?) réels et fictionnels, Lola Lafon questionne habilement les conséquences de l'anti-conformisme et les peurs qui l'accompagnent, cette crainte à l'encontre de celles qui défient les lois "naturelles" et qui va mener la petite fille riche devant un tribunal sans savoir précisément de quelle nature est son crime, puisque la seule revendication de Patricia Hearst était sa soif de liberté… Grâce à cette lecture, notre connaissance de cet épisode qui a marqué l’adolescence des jeunes Américain-e-s s’en trouve enrichie et on a envie de mener ses propres recherches pour comprendre à quel moment tout bascule, ce point de non-retour qui nous fait tourner le dos à nos origines et à notre vie d’avant. Fascinant, ce roman à voix multiples met en lumière de façon singulière et percutante ces destins de femmes libres, qui ont traversé les siècles, et qui continuent de questionner la condition féminine actuelle.
Catherine D.
Paru en août 2017. Aussi disponible en format numérique.
Guillaume Poix, jeune dramaturge français, signe un premier roman saisissant. D'une langue acérée et inventive, il nous plonge dans le monde apocalyptique des décharges de produits électroniques à Accra, au Ghana.
Partant d'une réalité connue et malheureusement authentique, l'auteur nous propose de faire connaissance avec Isaac, Moïse et Jacob qui, du haut de leurs jeunes années, vivent de la "fouille" de la décharge à ciel ouvert, celle qu'on nomme "La Bosse". Histoire de gagner quelques "cetis" (monnaie ghanéenne), de survivre surtout. Mais ils ne sont pas dupes et savent que la survie ne sera que de courte durée car l'inhalation des produits toxiques les tue à petit feu. On y rencontrera aussi Thomas, jeune photographe franco-helvète idéaliste, venu sur place pour réaliser un reportage photographique, et dont le chemin va croiser celui des garçons.
Les trois jeunes Ghanéens créent des liens, travaillent en équipe, s'entraident. Parlent le langage argotique de la Bosse, propre à ses adeptes, et particulièrement savoureuse. Il y aura même quelques moments de grâce comme ce match de foot organisé vaille que vaille sur la décharge, avec une pelote de fils conducteurs en guise de balle...
Mais les destins de ces personnages de fiction sont rattrapés par la noirceur de la réalité. Celle que nous décrit Guillaume Poix est d'autant plus écoeurante qu'elle est le résultat d'une surconsommation électronique dont notre société est responsable : obsolescence programmée, cynisme du monde occidental qui rejette sur le continent africain les déchets qui l'encombrent et refuse d'ouvrir les yeux sur les conséquences terribles de ces pratiques, rien ne nous sera épargné. Jusqu'à la chute, vertigineuse, où nous plongeons encore plus loin dans l'horreur.
Les fils conducteurs marque par son écriture au vitriol, nous happe et laisse des traces certainement profondes. Une lecture parfois difficile, douloureuse mais forte. Qui nous traverse comme une décharge électrique.
Delphine
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.