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Aux confins de l’Europe, la Bulgarie, la Grèce et la Turquie se partagent une frontière faite de montagnes, de forêts et surtout chargée d’histoire. Aujourd’hui, des migrants africains ou venant du Moyen-Orient tentent là-bas d’entrer en Europe, alors que durant la guerre froide, des allemands de l’Est la traversaient dans l’autre sens pour rejoindre la Turquie. Ces lieux sont aussi chargés de mystères et de légendes qui se racontent de génération en génération, qui se transforment au fil du temps.
L’autrice, bulgare, parcourt ce territoire et nous raconte la vie des gens qu’elle rencontre, de leurs familles et à travers elles, l’histoire de cette région, de l’Europe. On découvre des personnages incroyables issus de populations malmenées et déplacées au gré des remous politiques. Instructif, dépaysant, passionnant !
Catherine M
Paru en février 2020. Existe aussi en format numérique.
Avec ce premier tome d'une fresque familiale qui devrait en compter trois, Leïla Slimani nous emporte dans un recit doté d'un souffle impressionnant. Elle y raconte l'histoire d'une famille franco-marocaine, inspirée de sa propre histoire familiale. Ce premier roman est consacré à la décennie 1945-1955.
En 1944, Mathilde tombe amoureuse d'Amine, jeune et beau soldat marocain venu combattre sur le front français en Alsace. Ils se marient et elle le rejoint à Meknès après la Libération. La fougueuse Mathilde rêvait d'exotisme, elle va se heurter à l'aridité du quotidien qui l'attend au Maroc. Le couple s'installe sur des terres familiales situées dans la campagne aux alentours de Meknès, érige une ferme, décide de vivre du travail de ces terres. Le labeur est harassant, les revenus maigres, l'isolement pesant, surtout pour Mathilde qui est nostalgique de la France et de l'insouciance de sa jeunesse. Deux enfants naîtront rapidement : Aicha et Sélim.
Mais le climat au Maroc est tendu, les violences envers les colons français se multiplient, le peuple marocain réclamant l'indépendance. Mathilde et Amine incarnent la mixité : elle est Française chrétienne, lui Marocain musulman, leurs enfants métissés et à mi-chemin entre les deux cultures. Une mixité bien inconfortable en ces périodes de montée du nationalisme... La notion d' "étranger" est au coeur de ce roman, le "pays des autres" est sans cesse questionné : celui des indigènes marocains et leurs coutumes étranges aux yeux de Mathilde, celui des colonisateurs français et leur arrogance envers le peuple indigène, celui des hommes qui opposent leur autorité parfois brutale aux femmes, celui des pensées d'une femme européenne comme l'est Mathilde et qui restent un mystère pour Amine... La question de la féminité est aussi sans cesse interrogée : dans cette société marocaine, mais aussi en France, quel est le devoir d'une femme, d'une mère, d'une jeune fille (la jeune Selma, soeur d'Amine y tient aussi un rôle central), quelles sont leurs libertés ?
Leïla Slimani est douée d'une grande finesse pour décrire la psychologie de ses personnages, tout en nuances. Elle est très habile pour tisser un fil narratif dense et fluide à la fois. Elle excelle dans l'art de reconstituer les ambiances colorées de ces années 1950 au Maroc, un pays écartelé entre ses traditions ancestrales et son souhait de modernité. Son écriture est à la fois précise et souple, envoûtante, on se laisse emporter au fil des pages avec beaucoup de plaisir.
Un roman passionnant, d'une grande humanité, que l'on recommande vivement et dont on attend la suite avec impatience.
Delphine
Paru en mars 2020. Existe aussi au format numérique.
Gros coup de coeur pour ce roman qui se déroule dans une cité à Marseille et dans un bidonville tout proche, occupé par des gitans sédentarisés.
Au sein d’une famille située à l’autre extrémité de l’échelle sociale si on la compare à la famille mise en scène dans Les garçons de l’été, Rebecca Lighieri met en scène un père violent et maltraitant.
Ses trois enfants tracent leur chemin entre les coups et les cris, surtout le dernier-né qui est affecté de plusieurs problèmes de santé considérés comme d’impardonnables tares par le paternel. Quant aux deux aînés, dotés d’une beauté qui fascine, il n’hésite pas à tenter d’exploiter leur apparence en les traînant de casting publicitaire en audition.
Dans ce bouleversant roman, la beauté va se loger où on ne l’attend pas, comme souvent chez Rebecca Lighieri, qui fait fleurir des éclats de lumière dans les interstices de la glauquitude.
Natacha
Janvier 2020
Lire le premier chapitre de ce livre est une expérience frappante pour toute personne qui se sent « sensibilisée » à la cause climatique et aux causes sociales… Nous serons nombreux à nous y reconnaître dans les moindres détails et cela déjà suffit à rendre ce livre particulièrement digne d’intérêt.
La suite nous plonge dans un récit d’anticipation proche, inspiré des théories dites de l’effondrement. Il nous envoie à la rencontre de personnages qui doivent, de façon soudaine, en 2022, faire face à la disparition de ce qui fait aujourd’hui le tissu de notre quotidien, dans nos pays et dans les milieux les moins précaires : énergie électrique ou autre à profusion, institutions relativement fiables qui nous prennent par la main, paix sociale, confort matériel, alimentation au bout de la rue, antidouleurs à la salle de bain et service d’urgences à moins de 15 km…
Antoinette Rychner explore, avec une inventivité parfois glaçante, plusieurs dimensions d’un effondrement de société soudain et radical. Les récits d’anticipation sont nombreux, mais celui-ci a la particularité de se situer sciemment tout tout près de nous, au point que la prise de distance fictionnelle est à peine possible.
Inconfort matériel, violences, lutte pour la survie, tentatives tantôt bancales tantôt solides de refaire société dans ces conditions tout autres...mais aussi perpétuation de la création artistique, des relations amicales complexes, des tâtonnements éducatifs… Une exploration passionnante.
Natacha
Janvier 2020
Après un brutal accident, François se retrouve amputé des deux bras. A 22 ans, sa vie bascule et une nouvelle existence débute, faite de combats de tous les instants, de batailles perdues mais aussi de belles victoires. C'est une véritable métamorphose que François va opérer, il ne s'agit pas seulement de rebondir, il faut trouver une nouvelle manière d'être au monde, d'être en relation, d'exister.
Voici un magnifique roman qui parle d'un évènement dramatique et d'une vie qui bascule mais qui met surtout en scène le courage et l'espoir. Comme dans ses ouvrages précédents, Valentine Goby réussit à nous plonger dans une époque (ici les années 1950 en Europe) avec brio. On a des images plein la tête, et tout résonne avec beaucoup de justesse. A travers ce roman, c'est aussi une histoire du handisport qui nous est livrée, c'est une véritable ouverture sur cet univers assez méconnu finalement.
Une vraie réussite littéraire!
Catherine M. et Isabelle
Paru en août 2019
Nous recevons Valentine Goby à la librairie le mercredi 18 mars 2020 à 19h30.
Pierre Lemaitre est généreux : il nous offre avec ce roman riche en rebondissements, dense et rythmé, agrémenté d’une panoplie de personnages bien typés et de décors historique précis, une fin à sa saga en trois tomes entamée avec l’inoubliable Au revoir là-haut.
Concentrée sur une période courte, les premières semaines de la Seconde Guerre mondiale, l’invasion allemande, la débâcle française et l’exode, l’histoire est menée tambour battant par un Pierre Lemaitre qui sait doser ses effets...
Une fresque historique colorée, de belles ambiances, des situations savoureuses, de superbes méchants (dont un incroyable imposteur) et de naïfs gentils : si ce dernier tome est certes un peu moins percutant que les précédents, on ne s’ennuie pas !
Delphine
Paru en janvier 2020. Existe aussi au format numérique.
Dialogue brûlant, passionné et parfois brutal entre le narrateur, père de famille quadragénaire et Laura, son amour d’adolescence, que les classes, le temps et la vie séparent.
L’auteur allie étonnamment le sensuel et le sociologique, dans une ambiance sombre et mélancolique.
Olivier
Paru en janvier 2020.
Dans son patelin, Luky tue le temps et la fin de son enfance en trainant avec ses deux potes, Abdoul et Diego. Un jour, alors que Diego raconte comment il va se faire Vanessa, Luky confie à ses copains qu’il entend des voix. Mais difficile de le croire pour Abdoul et Diego. Alors Luky se renferme un peu sur lui-même et voit se rétrécir ses perspectives d’avenir et son entrée dans l’adolescence.
Un roman touchant, des personnages attachants, et surtout, une langue singulière, entre L’attrape-cœurs de Salinger et L’été des charognes de Johannin.
Olivier
Paru en janvier 2020
Il en souvent des êtres comme des simples, moins le sol leur donne, plus robustes ils sont.
Les simples, ce sont ces plantes médicinales utilisées telles qu’elles sont fournies par la nature ; ce sont ces plantes que sœur Clémence, doyenne et herboriste de la communauté de bénédictines de l’abbaye de Notre-Dame du Loup, utilise pour soulager et guérir parfois les maux des habitants de ce village de Provence. Cette vie ordonnée va être bouleversée par l’arrogance et la cupidité du nouvel évêque de Vence, Jean de Solines, qui ne peut tolérer l’indépendance et l’autonomie dont bénéficient ces religieuses. Le scandale va alors secouer la communauté et les accusations de sorcellerie se succéder… Roman qui dénonce les exactions des hommes de pouvoir, Les simples nous conte une histoire de rivalités, ponctuée de recettes de plantes en vers et de dictons médiévaux inventés (Sainte Vérane du ciel ouvre les vannes ou encore S’il pleut sur la chandelle, il pleure sur la javelle).
Catherine D.
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.
À l’image de la région que l’auteur parcourt, ce roman se révèle un foisonnement dense et inextricable d’histoire, de géographie et de littérature… Patrick Deville a décidé de remonter depuis l’Atlantique le fleuve Amazone et de traverser le sous-continent latino-américain jusqu’aux vagues du Pacifique. À force de rencontres et d’évocations, le narrateur, qui est à la fois l’auteur, nous introduit à ce qu’a représenté cette partie du monde pour différents explorateurs, scientifiques, artistes ou encore hommes de pouvoir et les incroyables destins qui s’y sont forgés. Ce voyage que Patrick Deville fait avec son fils de 29 ans lui donne aussi l’occasion de découvrir la nature de la relation à son fils, tout comme il lui permettra de constater les désastres environnementaux causés par une humanité sans cesse plus destructrice.
Intelligent et littéraire, Amazonia est une petite encyclopédie subjective, le genre de livre que l’on ne dévore pas mais que l’on déguste plutôt, chapitre par chapitre….
Grégory
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.
L’autrice de ce texte est anthropologue, et elle nous livre ici son histoire, son rapport au terrain qu’elle explore depuis plusieurs années, le grand Nord du côté de l’Alaska et de la Sibérie, là où les territoires sont enneigés une bonne partie de l’année. En août 2015, elle est attaquée par un ours dans les montagnes du Kamchatka, alors qu’elle vit depuis plusieurs mois auprès d’une famille d’éleveurs de rennes. Cet évènement a une résonance toute particulière pour ces peuples du Nord qui entretiennent avec la nature et les animaux des rapports de proximité et de mysticité proche de l’animisme.
Un magnifique texte qui nous transporte ailleurs, qui nous fait aussi réfléchir sur nos choix de vie et qui est en plus très agréable à lire.
Catherine M.
Paru en octobre 2019. Existe aussi au format numérique.
Grâce à la figure de Prosper Brouillon, son héros, Chevillard tire à boulets rouges sur le monde du livre industriel. Et précisément, sur les auteurs à succès qui sortent un livre tous les ans dans une logique de rentabilité. Suivez mon regard ! Dans ce deuxième opus, toujours illustré par Jean-François Martin, Prosper s’essaye à l’écriture d’un polar. Après le succès de son dernier roman, on suit l’auteur face aux difficultés auxquelles il fait face dans sa tâche : négocier son contrat, choisir sa chemise pour la prochaine émission télévisée, se faire frapper par l’inspiration divine, rentabiliser son cours d’écriture en ligne, caresser son égo, dresser des listes de synonymes. Et accessoirement, écrire une intrigue « qui obligera le lecteur, ce rat cupide, à cracher ses vingt euros ».
Caustique, violent, drôle et intelligent.
Olivier
Paru en octobre 2019. Existe au format numérique.
Voici un surprenant roman sur les aventures d’un pompiste. Ou plutôt, sur la parfaite banalité de son quotidien. L’auteur parvient à extraire la plus belle part de ce narrateur en esquissant son portrait par des traits qui se rapprochent de l’anecdote. Figure ignorée par la société, ce pompiste, amateur de littérature et de séries B, s’impose ici à travers une tranquillité et une intelligence toutes singulières. Il résiste ainsi aux clichés d’un monde (du travail) qui trace à toute allure.
Derrière ces courts chapitres, Alexandre Labruffe installe une réelle intrigue, sans avoir l’air d’y toucher, variant les registres avec adresse, tantôt humoristique, tantôt proche du polar, parfois érotique.
Olivier
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.
Quand le narrateur s’installe dans cette petite ville de France, il retombe sur son ami l’auto-stoppeur. Il est désormais en ménage, un enfant, une femme, Marie. Mais son amour pour la route n’a pas changé. Régulièrement, il quitte le cocon familial et s’en va lever le pouce sans destination ni explications précises. Sans date de retour. Une amitié renaît entre les deux hommes. Sincère, véritable, pleine de bienveillance. Lors des absences de l’auto-stoppeur, une place se libère dans le cocon familial et son ami y pose d’abord un orteil. Puis les absences se font de plus en plus longues.
Une superbe histoire d’amitié, d’amour et une ode à l’exil. Prudhomme dépeint magnifiquement et avec beaucoup de délicatesse tous les possibles amours et la mélancolie de nos vies potentielles.
Prix Femina 2019.
Olivier
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.
Dali Misha Touré, jeune autrice française de 25 ans, signe un roman aux allures autobiographiques : la narratrice s’exprime à la première personne dans un style fluide qui apparait spontané et sincère. C’est avec inventivité, en s’inspirant de ses expériences personnelles mais également du vécu de certains membres de son entourage que l’autrice a composé l’histoire d’une adolescente au parcours tortueux et, si elle partage avec cette dernière certains aspects de sa personnalité, comme son goût pour l’écriture, elle s’en distingue toutefois sur de nombreux points (leur schéma familial n’est, par exemple, pas le même).
La narratrice de Cicatrices vit en banlieue parisienne. Son père, un homme particulièrement sévère, est polygame. Lui, ses quatre femmes, leurs nombreux enfants, tous vivent agglutinés dans la même maison, manquant d’intimité, de calme, d’amour, de communication… Alors que les disputes se multiplient, la jeune fille devient acariâtre et violente. Comment évoluer dans un tel climat ? Sur quoi s’appuyer ? L’écriture peut-elle l’aider ?
Cicatrices est constitué d’une vingtaine de chapitres brefs, qui n'excèdent parfois pas les deux-trois faces. Dès le début, on se sent embarqués aux côtés de la narratrice et on tourne et tourne les pages. L’adolescente trace son chemin, elle prend du recul sans s’apitoyer sur son sort, sans condamner qui que ce soit ni prendre parti de façon catégorique lorsqu’il est question de sujets controversés. Ainsi, elle expose ses réalités, tout en nuances, évoquant par exemple les aspects positifs comme négatifs que revêt, depuis sa place d’enfant, la polygamie. Cicatrices est un roman quipeut être lu en une matinée tant il est prenant !
Alice
Paru en août 2019. Existe au format numérique.
Quel petit joyau d'écriture et de construction que ce roman de Frédérique Dolphijn.
Au gîte Mon rêve se succèdent les familles et les couples et, pour chacun.e, quelque chose se passera, un infime tremblement qui mènera certain.e.s au séisme. La forêt omniprésente, un enfant furtif à l'existence incertaine, le pouvoir d'un mot...tout cela fait aussi partie de l'histoire.
Autrice, éditrice, animatrice d'atelier d'écriture (entre autres chez Papyrus), artiste multidisciplinaire, Frédérique Dolphijn choisit ses mots avec soin, cultive les trouées de mystère tout en nous offrant des personnages palpables et concrets, interroge nos prisons et nos libertés, nos trajectoires de vie.
Objet littéraire atypique et prenant !
Papyrus reçoit Frédérique Dolphijn le jeudi 5 décembre à 19h30, soyez les bienvenu.e.s.
Databiographie, c'est une invitation sensible et décalée à parcourir la vie de l'écrivain belge Charly Delwart, le tout sous forme de statistiques mises en graphiques !
L'air de rien, on ressort troublé de la lecture de cette autobiographie d'un autre genre, tant les statistiques éclairées des anecdotes de l'écrivain nous parlent et viennent nous titiller sur le terrain du faussement semblable, de l'impression d'avoir aussi vécu ça, d'avoir aussi joué à ça. Arriver à transcrire des moments de sa vie en données, tel est l'objectif que s'était fixé Charly Delwart avec ce livre. A la manière des statistiques scientifiques, l'homme de 44 ans se propose de "répondre aux questions cette fois par les faits : qui j'étais objectivement, qui j'avais été jusqu'ici". Et voilà que l'intimité de l'auteur nous est révélée par les chiffres, de la superficie de pizzas ingérées (97 m² dont 82.4m² de pizzas napolitaines) au type de chaussures possédées (0 paire de sandales mais 8 paires de baskets), en passant par le nombre de photographies prises en 2018 (4661) dont 5 seront accrochées au mur, ou encore le total des jours vécus sous le soleil (4176) vs le total des jours vécus sous la pluie (5460) et le total des jours vécus dans un entre-deux (6425), jusqu'au partage d'une carte reçue de son père "pour ses dix-sept ans, qui se terminait par : La vie est à toi et je te la souhaite belle. Essaye de respecter les règles : c'est plus facile ainsi." Charly Delwart nous parle de lui, de sa famille, sans tabou mais avec tendresse et c'est avec un brin de mélancolie que l'on referme ce livre drôle et touchant, mis en lumière par le travail graphique remarquable d'Alice Clair qui le rend inclassable.
Catherine D.
Venez rencontrer l'auteur le mardi 12 novembre à 18h30 à la librairie !
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.

Aucun pathos dans l’histoire de cette jeune fille désorientée qui raconte le suicide de sa mère et la folie de sa sœur, sans avoir l’air d’y toucher, par des traits délicats et lumineux. Au travers de chapitres courts et incisifs, on pose la question du deuil, de l’hérédité, des peurs, de la tristesse, sans que la lecture ne pèse un gramme. Un roman touchant, qui fait souvent sourire, presque innocent, au style unique et dans une langue qui respire et n’en fait jamais trop.
Olivier
Paru en août 2019. Disponible aussi en version numérique.
1947, à Madagascar, la colère gronde au sein d’un peuple opprimé par le pouvoir colonial. Anciens soldats ayant servi pour la France, tirailleurs méprisés par une nation qui les a utilisés puis abandonnés, c’est tout un peuple qui menace de se révolter par les armes. Parmi eux, Zébu Boy, combattant fort et sans pitié, cherche à se reconstruire après une guerre qui a laissé trop de marques et à effacer les injustices du passé. Il finira, avec ses camarades du front, par incarner la révolte rageuse de ses compatriotes, un peu malgré lui, hanté par les images de la guerre.
Un roman fort qui traite d’un pan oublié de l’histoire à travers un personnage ambivalent ; attachant et dur, rempli de tendresse et de cicatrices, fier et altruiste. Parfaitement documenté, on nous plonge dans la fureur de l’injustice et de la violence, dans la dureté de la guerre et du deuil, grâce à des mots incisifs et percutant.
Olivier
Paru en août 2019. Disponible aussi en version numérique.
À 26 ans et après avoir accompli des études de philo sans jamais vraiment se frotter à la vie, Theodore-James Libski tourne en rond, entre ennui et oisiveté. Pour remédier à cela, son père l’envoie prendre part à une expédition ayant pour but d’observer la migration d’animaux en voie d’extinction. Theodore-James s’engage alors à bord de l’Izoard où il rencontre un équipage hétéroclite, formé de personnages rocambolesques. Leur navire traverse ainsi le globe à la rencontre d’espèces animales rares. Notre héros goûte lui à la vie et ce que le monde a à lui offrir.
Une premier roman drôle, parfois loufoque, au style singulier et à la langue riche et foisonnante.
Olivier
Paru en août 2019. Aussi disponible en version numérique.
Karine Tuil nous offre un excellent roman ancré dans le réel d'une société dirigée par les médias, le pouvoir et l'argent et à la lecture de celui-ci, on ne peut s'empêcher de rapprocher son travail de celui de l'écrivain journaliste Tom Wolfe.
Jean Farel, star du journalisme politique français au bras long, se pavane sur les réseaux sociaux tout en entretenant des liaisons avec de jeunes et jolies femmes; son épouse, Claire, est une essayiste féministe reconnue pour ses engagements et depuis peu, en couple avec un professeur de confession juive; et enfin, Alexandre, leur fils chéri, est étudiant aux Etats-Unis et de passage à Paris pour assister à la cérémonie de décoration de son père à l'Elysée... Et c'est par ce fils introverti, peu sûr de lui mais ne doutant pas de sa qualité de mâle dominant, meurtri par un chagrin d'amour, que le scandale va arriver, lorsqu'il se retrouve accusé d'un viol qu'il doute avoir commis...
Il y avait toujours un moment dans la vie où l'on piétinait ses idéaux avec une velléité suspecte.
Karine Tuil porte un regard incisif et tranchant sur les rapports humains qui se délitent lorsque surgit un "incident" qui ne permet plus le retour en arrière. Elle dissèque avec brio les pensées, sentiments et actions de ses personnages qui, tout en dénonçant leur perversité, nous ébranlent dans nos certitudes. On sombre avec eux dans les tentatives de corruption, on baigne dans la manipulation médiatique, parentale, amoureuse, filiale, on frissonne à l'évocation des détails scabreux et surtout à la lecture des mots de ceux qui veulent protéger à tout prix ce fils immature élevé comme un roi; et puis, on referme ce livre en conservant un arrière-goût de questions restées sans réponse... Intelligent, acéré, Les choses humaines est le roman du pouvoir des médias, du pouvoir tout court, et d'une époque par laquelle #metoo est passé. Brillant !
Catherine D.
Paru en août 2019. Existe aussi au format numérique.
Voici un livre drôle et pertinent, cocasse et plein d'ironie salutaire sur les folies des humains.
Wendy est manouche et, malgré le scepticisme de son entourage, elle a décidé de sauver les gadjé de leur malheur. L'occasion pour l'autrice de chambrer allègrement, en inversant les rôles d'une façon assez jubilatoire, la condescendance exercée souvent à l'encontre des gens du voyage qu'on veut "aider".
Mais il y a bien plus dans ce livre fou et artistique : des manipulations génétiques, des panels de citoyens, du farniente, un hôtel bruxellois, des enfants et des films d'horreur.
Lecture piquante, vive et parfois à mourir de rire !
Natacha
Paru en août 2019.
Nous recevons Emmanuelle Pireyre le mercredi 22 janvier 2020 à 19h30. Soyez les bienvenues et bienvenus.
Les personnages de Jean-Paul Dubois sont tout un monde à eux seuls, chacun. À la fois construits avec inventivité et criants de vérité, pour ce qu'ils révèlent d'une époque, d'un monde. Les injustices affleurent, évoquées avec une évidence à peine teintée d'amertume.
Incarcéré pour deux ans, Paul Hansen partage sa cellule avec un Hells Angels gigantesque et nous relate l'intimité impitoyable qui est la leur, tout en nous racontant ce qui l'a conduit, lui, dans cette prison de Montréal où viennent chaque soir le retrouver ses trois fantômes et leur douce présence.
Dans un récit prenant et fluide à la manière du delta d'un fleuve, Hansen évoque son père, pasteur norvégien en France, et sa mère, beauté directrice d'un cinéma de création, notamment dans les années 60-70 où la libération de toutes les entraves concerne aussi le 7ème art.
Il évoque aussi son amour Winona, aviatrice aux origines mi-irlandaise mi-inuit. Mais encore son chien fidèle, son voisin solidaire et tous ceux qu'il a croisés sur sa route jusqu'au moment de son arrestation.
Le monde du travail et ses terribles détricotages sont un des fils conducteurs du roman : Paul Hansen a été de longues années homme à tout faire dans un immeuble où il recousait aussi parfois les chagrins, puis a vu son métier se réduire à sa part la plus glaciale et strictement productive. Son père s'était retrouvé parachuté dans une région truffée de mines d'asbeste. Son ancien voisin doit fouiller l'intimité des endeuillés pour une compagnie d'assurances. Etc...
Un excellent Jean-Paul Dubois, empreint d'empathie, de révolte et d'humanité.
Natacha
Paru en août 2019
De nombreux auteurs et autrices ont invité dans leurs livres les situations vécues par des migrant.e.s ces dernières années (amorce de liste éclectique : Pascal Manoukian, Emmanuelle Bayamack-Tam, Hugo Boris, Eva Melandri, Hakan Günday et tant d'autres).
Marie Darrieussecq le fait ici avec une honnêteté qui lui permet de venir nous chercher, nous lecteurs, au coeur de nos contradictions d'Européens et d'Européennes touché.e.s par les situations des exilé.e.s mais pas toujours prêt.e.s à sortir de leurs vies pour venir en aide ou pour interpeller face à l'indifférence. Cela fait de son livre un miroir à la fois empathique et subtilement dérangeant.
Rose vit à Paris, a un adolescent connecté, une petite fille allergique, un mari au bord du burn-out, elle travaille comme psychologue dans un centre de santé mentale. Tout ça, ça remplit une vie. La misère humaine à l'occidentale, elle connaît, et elle la côtoie de près dans son métier. Mais un métier, c'est défini, ça a des contours, on rentre chez soi le soir et on peut fermer la porte.
Au début du roman, Rose est en croisière sur la Méditerranée - un cadeau de sa mère, en cabine "juste un peu mieux que la cabine sans fenêtre". Le bateau croise une embarcation en détresse, certains passagers sont recueillis sur le paquebot, d'autres sont morts. Avant que le bateau de croisière débarque les migrants sur une vedette italienne de garde-côtes, elle rencontre le jeune Younès et lui donne le téléphone de son fils.
Le roman relate les mois qui suivent. Le téléphone a maintenu un fil possible entre Younès et Rose. Rose qui continue à vivre sa vie de française de la classe moyenne pas trop mal lotie, qui déménage, retrouve un travail, s'inquiète de l'eczéma de sa petite fille, et que, régulièrement, Younès appelle avec l'ancien téléphone de son fils.
La mer à l'envers est un excellent roman qui se lit d'une traite et dont nous ne vous révélerons pas l'issue.
Natacha
Paru en août 2019.