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Commencer la lecture de ce livre, c'est plonger dans une enquête qui ne s'achèvera qu'une fois le livre refermé, c'est oublier le temps qui passe, le thé qui refroidit, le soir qui tombe sur une nuit d'insomnie. Vivian Maier, femme insaisissable, nounou et talentueuse photographe américaine dont l'oeuvre monumentale (plus de 140 000 images) n'a jamais été montrée de son vivant, reprend vie et épaisseur dans cette biographie richement illustrée réalisée par Ann Marks. Le travail de cette dernière, fruit de six années de recherches, de documentations, d'interviews, permet enfin de mieux comprendre "Qui était Vivian Maier et pourquoi n'a-t-elle jamais partagé ses photographies?". C'est une Vivian différente qui se révèle au fil des 350 pages de cet ouvrage, une femme libre de ses choix, engagée, aventureuse, féministe aussi, pour qui la photographie est une nécessité, un art de vivre. Mais c'est également une femme solitaire et compulsive qui accumule les clichés, grâce auxquels cependant Ann Marks réussit à retracer un récit chronologique de la vie et de l'oeuvre d'une des plus grandes photographes de rue au monde. Ce brillant ouvrage ravira aussi bien les amateurs de photographie que ceux passionnés d'enquêtes historiques et sociologiques !
Catherine D.
Paru en octobre 2021.
Émanation du génial podcast du même nom, Le coeur sur la table observe et analyse les ingrédients socialement et culturellement construits de nos relations amoureuses.
Décortiquer l'amour, beurk ! Est-ce qu'on ne risque pas de l'abîmer ?
Lecture faite...eh bien non, pas du tout ! Quelle libération au contraire, quel bol d'air, quel grand vent d'air frais !
Le couple est-il vraiment la garantie d'un bonheur, ou devrait-on chercher le bonheur pour lui-même, et éventuellement y ajouter l'amour comme ingrédient bonus ? Le conte de la petite sirène qui s'ampute pour pouvoir être aimée : est-ce bien raisonnable de le raconter aux petites filles ? Et quand on forme un couple, quel qu'il soit, au fond...que se doit-on ? Si ces questions vous parlent, foncez sur ce livre plein d'humour, d'intelligence, d'empathie, de sensibilité...et d'amour.
Natacha
C'est dans les tableaux , désormais, que résonnent nos pas, nos rires, nos danses et nos chansons - comme dans le patio sur lequel donnait sa chambre.
Entre roman graphique et récit biographique, Ce que Frida m'a donné nous entraîne au coeur de l'intimité de son autrice et du sujet de cet objet littéraire atypique, Frida Kahlo. Sublime évocation de l'artiste mexicaine, à laquelle répond le non moins sublime récit autobiographique de la peintre Rosa Maria Unda Souki, ce très bel ouvrage nous entraîne dans la vie de ces deux femmes, à travers le regard singulier que cette dernière pose sur la maison, les oeuvres et les relations familiales et amoureuses de Frida Khalo. Richement illustré, ce roman nous accueille en douceur dans le cocon feutré et coloré créé par son autrice, dont la découverte de l'oeuvre à travers ses 54 tableaux ne cesse de nous ravir les yeux. Vivement les découvrir en vrai dans un musée belge... reste à savoir quand ?
En attendant, nous avons ses superbes dessins et ses mots tendres qui questionnent autant notre rapport au monde que la créativité comme besoin vital d'être au monde !
Catherine D.
Paru en août 2021. Existe aussi au format numérique.
Dans ce monde nocturne et souterrain, les rames sont des tombes. Le tumulte de la surface n'est plus perceptible depuis les profondeurs. Les problèmes de filles, de bandes, de famille ne sont plus que des murmures lointains et plus rien ne peut entamer cet état de "grâce ténébreuse" qui recouvre son corps et son âme, tel un suaire.
Karim Madani nous emmène dans les années 1990, lorsque les auteurs de graffiti étaient poursuivis comme des criminels qu'ils n'étaient pas. Plus particulièrement, il va s'attacher aux pas de Luc, alias Comer, l'un des graffeurs les plus en vogue à l'époque ainsi qu'à quelques autres, proches et moins proches de celui-ci. Emaillé de citations de films, de références discographiques et de confidences des principaux protagonistes, ce livre se lit comme une enquête qui remonte le temps jusqu'à la prise finale en 2001 : une soixantaine de graffeurs seront inculpés, menacés de peines jusqu'alors réservées au grand banditisme. C'est toute une histoire populaire, sociale et politique qui se joue dans ce roman virtuose qui retrace le parcours de ces chantres de l'art libre et mouvant qu'est le graffiti !
Catherine D.
Paru en octobre 2021. Existe au format numérique.
Que transmet-on à sa fille, sa fille unique, quand on a renié son passé? Quand on a pu ou cru pouvoir se réinventer, dans un autre pays, une autre langue?
Ce n'est pas par hasard que Jakuta Alikavazovic choisit le musée du Louvres pour y passer "sa" nuit. En effet, petite fille, elle y venait régulièrement avec son père et un rituel immuable se jouait à chaque visite, une question comme un jeu, d'un père à sa fille : Et toi, comment t'y prendrais-tu pour voler la Joconde? L'autrice, invitée dans ce lieu mythique, va tenter, le temps d'une nuit passée aux pieds de la Vénus de Milo, de reprendre le dialogue avec ce père prêt à quitter sa famille, ses amis, sa langue à vingt ans pour aller vivre à Paris parce qu'il voulait vivre dans la beauté. Un père habité de son exil volontaire et qui aura transmis à sa fille l'histoire et l'amour de l'art mais peu de son histoire à lui. Et cette nuit sera pour elle l'occasion de redevenir la fille de mon père. Sensible hommage à ce père secret et amoureux, Comme un ciel en nous est vibrant de sincérité et d'amour filial, où la beauté n'est pas un mot vide.
L'amour de mon père était un ciel en moi, sa réalité aussi évidente que celle du ciel au-dessus de ma tête, que je le voie ou pas.
Catherine D.
Paru en septembre 2021 en grand format, en octobre 2022 en édition poche. Existe aussi au format numérique.
La société en est arrivée à un tel état de dévissage culturel, le conformisme et l'injonction normative sont devenus de tels fléaux que toute déviation, tout pas de côté, toute élégance gratuite en vient à acquérir une portée subversive. Aussi, couplés à une intention politique, le "refus de parvenir" et la "dignité du présent" sont aujourd'hui susceptibles de s'inscrire dans la longue lignée de l'action directe et de la non-coopération au système, au titre de sabotage symbolique.
Sous-titré Réflexions sur l'effondrement, cet ouvrage révèle un puits sans fond de gouttes de positivité dans un monde consumé par sa consommation effrénée. Corinne Morel Darleux, militante écosocialiste, excelle dans l'art de la contradiction assumée, de l'humour (noir) sur un sujet dont on ne connaît pas la fin, du questionnement et du doute comme ligne de conduite. Ce petit essai est un grand ouvrage, chaque ligne nourrit la pensée, rebondit sur une autre et atterrit sur une exclamation. Quand l'autrice questionne notre quotidien, elle convoque le navigateur Bernard Moitessier, qui lui inspirera le concept du "refus de parvenir", Romain Gary et ses "Racines du ciel" ou encore les lucioles de Pasolini pour nous parler de la "dignité du présent", de la place et des choix de l'individu dans une société donnée et surtout de l'importance de la politique censée "fournir le cadre collectif qui rend possible le libre choix des individus qui la composent."
En bref, parce qu'il est inutile de tenter la paraphrase, ce livre est à lire, de toute urgence, en prenant le temps de se questionner. Essentiel !
Catherine D.
Paru en 2019 et 2021. Existe au format numérique.
Je suis rentré pour rester, quand un être s'en va, il faut qu'un autre prenne sa place, la mienne est restée vide si longtemps.
Premier ouvrage de la toute nouvelle collection "Agonia" dédiée aux polars, Ombre nous emmène au coeur de la Crète, cette île européenne paradisiaque où la quiétude semblait ne jamais devoir être troublée... Mais c'était sans compter sur le retour au pays de Dimos Guérès, flic au service des passeports à Athènes, qui revient au chevet de son père mourant après plus de vingt ans d'absence. A peine débarqué du bateau qu'un premier cadavre se retrouve sur sa route... D'autres suivront tandis qu'il tentera de démêler l'écheveau inextricable de ces meurtres violents et mystérieux qui le ramènent inexorablement à sa famille et à l'ombre de sa propre mère, dont la mort fut le détenteur de sa fuite sur le continent. Habilement mené, ce polar tend sa toile sur fond d'élections législatives qui mèneront le parti d'extrême droite Aube dorée à la victoire en 2012, tandis que Guérès devra replonger dans l'histoire de son pays natal pour éclairer et dissiper les ombres des secrets de famille. Haletant !
Catherine D.
Paru en septembre 2021, traduit du grec par Lucile Arnoux-Farnoux.
Qu'est-ce que ça signifie de venir d'un endroit, quand on ne connaît rien de cet endroit? Voilà qui l'attriste. Elle a regardé l'océan, c'est tout, et maintenant elle se retrouve avec le coeur brisé à cause de l'Italie.
William Boyle retourne dans son quartier d'enfance pour nous offrir un roman choral emmené par Don, flic violent et corrompu mais néanmoins coupable d'élans de générosité qui le dépassent lui-même. Quand le passé va le rattraper, c'est la destinée de ses voisins qui va s'en retrouver bousculée... De l'adolescente désoeuvrée à la veuve éplorée, en passant par le jeune homme qui rêve de conquérir Hollywood, on part à la rencontre de l'héroïne principale de ce roman noir profondément humaniste, Brooklyn, et c'est une réussite ! A la fois fresque sociale et intime, chaque personnage est finement croqué et nous lisons cette histoire d'une traite, en avalant les chapitres comme autant d'épisodes d'une série télé qu'il est impossible de lâcher !
Catherine D.
Paru en édition poche en janvier 2023, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Simon Baril. Existe aussi au format numérique.
Je me suis aperçue que mon ardent désir de vivre à New York, de fréquenter Lou Reed à Greenwich Village et le reste est pour moi une chose douloureuse, grave, dévorante et, pour le reste de l'humanité, une vaste blague. Quand on est mennonite, pas moyen d'avoir envie de découvrir le monde puisque le monde tourne cette envie en dérision. C'est la trame d'une comédie, sans plus. Une mennonite à New York. Une famille amish en goguette à Soho. Il est terriblement déprimant de s'apercevoir que ses désirs les plus ardents se mesurent à Hollywood en rires à la minute.
Drôle de tendresse, c'est un roman à la fois grave et léger comme une feuille qui virevolte dans la poussière soulevée par la tempête... Nomi est une jeune fille mennonite perdue pour sa communauté, qui tente de rester debout avec ses envies et ses rêves d'adolescente, en compagnie de son petit ami, de son père Ray mais sans sa mère ni sa soeur qui ont disparu à quelques semaines d'intervalle. C'est une vie faite de frustrations, d'interrogations, de douleurs, mais remplie aussi de poésie, de vivacité et d'humour ravageur.
Miriam Toews nous livre une nouvelle fois un livre beau et puissant qui ne laisse pas indifférent et qui donne matière à réfléchir sur le monde dans lequel nous nous inscrivons.
Catherine D.
Paru en octobre 2021, traduit de l'anglais (Canada) par Lori Saint-Martin et Paul Gagné. Existe aussi au format numérique.
La contingence, la possibilité qu'une chose arrive ou n'arrive pas, qu'un être existe ou n'existe pas.
Une suspension inexpliquée, un cheval dans Beaubourg, une voisine ivre morte, une collègue (trop?) attentive, et c'est la vie du flic Abel Bac qui soudainement prend une tournure inattendue.
Une histoire où l'art se fait rédemption, construite comme une fable de La Fontaine, fil rouge de ce roman à l'allure policière qui nous embarque dans la vie présente et passée des ces trois personnages qui ont tous quelque chose à cacher... Claire Berest nous offre un roman tourbillonnant, jusqu'à la dernière ligne!
Catherine D.
Paru en août 2021. Existe aussi au format numérique.
Filmer le souvenir : filmer une trace de ce qui a eu lieu mais qui ne peut se filmer.
Un siècle de cinéma raconté à travers le regard (et la caméra) de Gabriel, qui nous est conté par son petit-fils Adrien, chantre désabusé des évolutions numériques du 21e siècle.
Une magnifique ode à l'image animée, dans ce qu'elle a de plus tangible et de plus évanescent... Mais que nous reste-t-il au bout du compte de toutes ces images ?
Un livre sur la création artistique et sur la disparition (des gens qu'on aime, d'une époque, des images, d'une mode...)
A découvrir et à laisser infuser, le temps qu'il faut !
Catherine D.
Paru en août 2021. Existe aussi au format numérique.
"C'est maintenant, à l'âge adulte, que je réalise la tromperie dont j'ai été victime sur les bancs de l'école. La relégation de mes ancêtres femmes me met en colère. Elles méritent mieux. Notre histoire commune est beaucoup plus vaste que celle que l'on nous a apprise."
Voici un essai qui tour à tour nous instruit, nous indigne, nous enthousiasme ! À la lumière de (re)découvertes récentes, Titiou Lecoq décortique la façon dont l’histoire a été écrite, et met en lumière le rôle des femmes à travers les siècles : non pas aux fourneaux, mais bien souvent aux avant-postes des grands (et petits) événements, de la création artistique et des luttes pour les droits sociaux.
La journaliste convoque des révolutionnaires, artistes, reines, inventrices ou encore autrices aux vies passionnantes, qui méritent résolument d’être sorties de l’oubli, le tout de façon très accessible et avec plein d’humour, ce qui rend la lecture vraiment réjouissante !
Titiou Lecoq sera à la librairie le vendredi 29 octobre à 17h30. Réservez votre place ;-)
Hélène
Paru en septembre 2021. Aussi disponible au format numérique.
En pleine pandémie, Eric se retrouve coincé entre sa femme obsédée par les gestes barrières et son ancien ami Kevin, survivaliste de l'extrême qui construit une BAD (Base Autonome Durable) et songe au cannibalisme pour sa survie. Quel camp choisir quand aucune des solutions qui s'offrent à lui ne semblent pouvoir le satisfaire ?
Eric Chauvier nous livre un satire drôle et cynique d'un présent dangereusement proche. Et qui se termine en une dystopie terrifiante qui pourrait bien être la suite de la pandémie, une fin du monde terrible mais crédible.
Olivier EK
Paru en septembre 2021. Existe aussi en version numérique.
Mona et Pauli ont survécu à d'étranges et immenses inondations. Elles vivent et s'aiment à Tabor, un nouveau monde bricolé. Mais de mystérieux visiteurs, sorciers ou fonctionnaires, viennent en troubler l'équilibre, jusqu'à l'ensauvagement définitif. Comment faire face?
Encore un roman postapocalyptique? Oui, et celui-ci vaut le détour! Phoebe Hadjimarkos Clarke nous livre ici un premier roman réussi, foisonnant, un peu délirant, qui reste longtemps avec ses lecteurs. Il nous entraîne dans un "monde d'après" où l'humain peine à se réensauvager et où les superstitions prennent une place de plus en plus grande... À découvrir assurément!
Hélène
Paru en septembre 2021.
Après avoir passé trois ans sans utiliser d'argent (une expérience qu'il relate dans son premier livre), l'auteur Mark Boyle décide de s'installer dans la campagne irlandaise, et se lance un nouveau défi: vivre pendant un an dans une maison construite de ses mains, sans aucune technologie moderne, ni électricité, ni eau courante. Le 21 décembre, jour du solstice d'hiver, il éteint son téléphone portable pour la dernière fois, et ainsi commence l'aventure. L'auteur va vivre au rythme de la nature pendant quatre saisons, et en tirer ce livre qui est un passionnant récit, émaillé de réflexions sur l'écologie, notre rapport au monde naturel, et nos modes de vies. Il prend le parti de vivre au plus près de ses convictions, sans pour autant idéaliser la vie rurale, ni la vie "d'avant". Un livre étonnant et inspirant!
Hélène
Paru en juin 2021. Traduit de l'anglais (Irlande) par Valérie Le Plouhinec. Disponible aussi en version numérique.
Alors qu'elle est encore une écrivaine débutante, Carmen Maria Machado rencontre une jeune femme sophistiquée et fascinante qui la séduit. Très vite, cette passion est partagée et elles s'installent ensemble dans leur "maison rêvée" pour vivre pleinement leur amour. Mais ce rêve tourne rapidement au cauchemar quand la compagne de Machado devient jalouse, paranoïaque et violente tant en paroles qu'en actes. Cette "maison rêvée" ne serait-elle pas un pièce ou une prison? Peu à peu l'autrice s'enferme dans une relation toxique dont elle peine à s'échapper...
Un très beau récit sur un sujet rarement abordé en littérature: la violence conjugale au sein des couples de même sexe. L'autrice relate sa propre histoire, tout en faisant un état des lieux des recherches sur ce sujet. Cela donne un livre intelligent, inventif, important!
Hélène
Paru en août 2021. Traduit de l'anglais (États-Unis) par Hélène Cohen. Aussi disponible en version numérique.
Plus de 50 ans après les faits, Philippe Jaenada rouvre une nouvelle fois un cold case et nous replonge dans la France des années soixante. Tel un enquêteur minutieux et entêté, l'auteur réexamine tous les faits qui, suite à la découverte du cadavre du petit Lucien Taron dans un bois de la banlieue parisienne, ont conduit à la condamnation et à l'emprisonnement pendant 41 ans (une des plus longues détentions de France) de Lucien Léger, alors jeune infirmier. Une brique de 700 pages dont l'un des buts est de nous laisser voir, recherches à l'appui, que "les pervers, les fous, les odieux, les monstres" dans notre société ne sont pas toujours ceux que la vox populi, voire la justice condamne, mais plutôt ceux qui trouvent dans l'essor des médias (et du sensationnalisme) ainsi que dans l'incompétence ou la négligence de certains avocats et d'autres acteurs du monde judiciaire, un moyen de faire condamner un innocent. Aucun détail ne nous est épargné, ni dans l'enquête proprement dite, ni dans les considérations de l'auteur par rapport à celle-ci - il s'exprime alors entre parenthèses où son humour corrosif fait souvent mouche. Un livre très dense, pour lecteurs de fonds, dommage que la concision ne soit pas la tasse de thé de Jaenada (c'est un choix de sa part) car il écrit merveilleusement bien.
Gregory
Paru en août 2021. Aussi disponible au format numérique.
Roman historique qui nous montre Winston Churchill sous son meilleur jour, l'homme politique courageux, volontaire et obstinément pugnace, face à une situation militaire plutôt mal embarquée en ce début de 1940, si l'on considère que les bombardements s'intensifient dans plusieurs villes du Royaume, qu'une attaque terrestre est plus que probable et que les Etat-Unis ne sont pas très chauds à l'idée d'envoyer de l'aide matérielle, et encore moins des soldats de l'autre coté de l'Atlantique. Basé principalement sur des journaux intimes et des documents rendus publics récemment, ce livre nous invite à découvrir la vie ordinaire tout autant qu'extraordinaire du Premier Ministre, de sa famille, des ses conseillers proches et des émissaires américains envoyés par Roosevelt - notamment pour voir de quel bois se chauffe ce Churchill. Lecture facile et très agréable pour se plonger dans l'ambiance de la première année de guerre en Angleterre, et plus spécialement à Londres et dans les villes bombardées par la Luftwaffe de Göring.
Gregory
Paru en septembre 2021. Aussi disponible en version numérique.
Encabanée de Gabrielle Filteau-Chiba (Le mot et le reste), nous emmène au Québec et surtout en pleine nature. Réfugiée dans une cabane perdue au milieu de la foret, une femme s'isole de ses semblables pour tenter de répondre à une question simple : que vais-je faire de ma vie? Un ouvrage tout court qui nous immerge dans la routine des gestes essentiels pour survivre au cœur d’un hiver rigoureux mais qui, surtout, nous montre comment une fois ses racines retrouvées, la colère, la rage et le dégoût peuvent laisser place à une certaine forme de sagesse, tout aussi militante!
Gregory
Paru en Europe en janvier 2021
Louis-Philippe Dalembert s’inspire du destin tragique de George Floyd, Afro-Américain mort en 2020 suite à l’interpellation violente d’un policier. Il lui crée un double fictif, Emmett, la quarantaine, né dans un ghetto de Milwaukee dans le Winsconsin. Son personnage, promu dans sa jeunesse à un brillant avenir de footballeur américain devra renoncer à son rêve, n’étant finalement pas sélectionné pour une carrière professionnelle. La mort dans l’âme, il retournera à sa vie d’avant, une vie de débrouille et de précarité. Emmett nous est raconté depuis l’enfance, en passant par ses années d’adolescence et de fac, jusqu’au jour fatidique de sa mort, à ses funérailles… et jusqu’au soulèvement planétaire d’indignation et de révolte provoqué par sa mort.
Ce qui est intéressant et original dans la construction de ce roman, c’est que l’auteur a pris le parti de donner la parole à différents protagonistes. Ceux qui l’ont connu de près : ses amis d’enfance, sa mère, la pasteure de son quartier, sa fiancée à la fac, son coach de football américain. Ou de loin : l’épicier qui appela la police le jour du drame, les acteurs du soutien à sa cause et même le policier qui sera jugé coupable de son homicide. Les voix se succèdent, contrastées, pour brosser le portrait, attachant, de ce garçon qui avait rêvé d’un autre avenir et qui connut finalement un destin tragique.
Tout comme Alabama Blues dans les années 1950, Milwaukee Blues dénonce les intolérables crimes raciaux encore perpétrés au XXIe siècle et rend hommage à ces destins fracassés. Louis-Philippe Dalembert décortique les faits et dresse un portrait au scalpel de la société américaine et occidentale face à ses démons...
Un texte dense et poignant, qu’on ne lâche pas.
Delphine
Paru en août 2021. Existe aussi au format numérique.
Sorj Chalandon livre un roman puissant et bouleversant sur la relation père-fils, un texte percutant autour des thèmes de la trahison et du mensonge, où s’entrelacent la petite et la grande histoire.
Au printemps 1987, Sorj Chalandon, alors journaliste, couvre le procès de Klaus Barbie, le chef de la Gestapo qu’on surnommait « Le Bourreau de Lyon » pour avoir torturé, exécuté et ordonné la déportation de nombreux juifs vers les camps de concentration. A cette époque, le père de Chalandon insiste auprès de son fils pour pouvoir assister aux audiences de ce procès et les suit avec assiduité, voire passion.
Déjà dans le roman « Profession du père » où il tient le rôle principal, ce père nous est décrit comme un mythomane, un pervers redoutable. Ici, Sorj Chalandon s’attache à découvrir en quoi ce « salaud », ce manipulateur, ce tricheur et menteur invétéré a connu un passé trouble sous l’Occupation : quel rôle aura-t-il joué exactement pendant la Seconde Guerre mondiale ? Pourquoi son père est-il à ce point fasciné par le procès de Klaus Barbie ? Obsédé par l’histoire de son père depuis son plus jeune âge, le romancier aura finalement accès au dossier judiciaire de ce père jugé en 1945 pour actes nuisibles à la Défense nationale.
Dans le roman, le déroulé du procès de Klaus Barbie nous est raconté au fur et à mesure que le narrateur, double de Chalandon, découvre les éléments qui constituent le dossier judiciaire de son père. Le narrateur y affronte ce père insaisissable en un dialogue bouleversant, le met face à ses mensonges et ses contradictions. A travers ce texte, Sorj Chalandon met en scène cette confrontation tant attendue, cette discussion qu’il aurait tellement aimé avoir avec son père. Afin que ce dernier puisse révéler son vrai visage et que père et fils puissent enfin nouer un dialogue. Car sous le ressentiment et le désespoir du fils, on sent aussi l’envie et le besoin de renouer avec son père...
Mots percutants, style fluide et envoûtant, Sorj Chalandon nous embarque dans ce récit très personnel qui ne laisse pas indifférent.
Delphine
Paru en août 2021. Existe aussi au format numérique.
Grand voyage hivernal à travers le deuxième plus grand désert démographique d'Europe -la région arctique de Scandinavie occupant la première place du podium. Un voyage pour écouter les quelques personnes, souvent très agées, qui sont restées habiter dans un de ces villages dépeuplés de la "Laponie espagnole". Restées là faute de mieux mais aussi parfois par choix, pour que la campagne et le monde rural en général ne soient plus stigmatisés et systématiquement oubliés en terme d'infrastructures. Ni idéalisés non plus. Plus largement, le problème ne se limite et ne se limitera pas à l'Espagne et l'auteur, journaliste en Espagne, nous interroge sur notre inscription physique dans le monde. Ou habiter aujourd'hui et pourquoi? Pourquoi partir, pourquoi rester?
Gregory R
Paru en mai 2021
Essai engagé qui aborde une navigation un peu particulière, celle des grands yachts et du luxe avec un L en taille de police 160. Une niche en pleine expansion, tant par la taille des bateaux que par leur nombre. La démarcation sociale ne connait aucune limite en ce domaine, leur cout est exhorbitant et plus encore l'énergie necessaire à leur utilisation. L'auteur y voit non pas une anomalie du capitalisme, un petit excès qu'il suffirait de supprimer mais bien plus le reflet évident d'un système qui s'emballe et conduit à notre perte. Intéressant et ludique (et nous voilà à la page en matière de luxe et de raffinement sans devoir s'abonner à un magazine de yachting...). "Tirer le fil du superyachting, c'est dévider toute la pelote du capitalisme".
Gregory R
Paru en mai 2021
Par hasard, dans une brèche de sa vie monotone, le narrateur découvre les plaisirs d’un parc aquatique « tropical ». Entre le jacuzzi et la rivière sauvage va s’enclencher chez lui une obsession pour la vie « tropicale » et ce qu’il imagine être les « corps tropicaux ». De cette curiosité et avec une candeur à la fois énervante et attachante, il va se retrouver secoué dans son quotidien, à l’autre bout du monde, porté par cette quête insensée de tropicalité.
C’est d’abord curieux, cynique et drôle puis grave, aventureux et touchant. On s’attache à cet anti-héros candide et désabusé. C’est servi par une écriture unique et addictive. Une réussite magistrale !
Olivier
Paru en août 2021. Existe aussi en version numérique.
Quelque part en Europe, peut-être dans pas très longtemps: il fait chaud, les températures continuent d'augmenter de semaine et semaine, les arbres ne donnent presque plus de fruits, la terre presque plus de légumes. Skalde et sa mère Edith vivent dans une communauté séparée du reste du monde par une rivière, dont ils ont fait sauter le pont il y a bien longtemps, pour se protéger. Personne ne sait ce qu'il se passe au-delà du cours d'eau. Un jour, lors d'une promenade en forêt, Skalde croise le chemin d'une petite fille aux cheveux roux, couleur qui détonne étrangement dans cette région où même les animaux sont progressivement devenus blancs. Meisis emménage avec les deux femmes, devenant un sujet de discorde supplémentaire entre la mère et la fille, et surtout avec le reste des villageois. Superstitieux, ils mettent bientôt en branle une véritable chasse aux sorcières pour se débarasser de l'enfant ainsi que d'Edith et Skalde.
Helene Bukowski, jeune autrice allemande, signe un premier roman qui se lit presque d'une traite. La nature, malade mais toujours plus forte que l'humain, s'étend en toile de fond pesante d'un huis-clos sous tension, où les relations de groupe et interpersonnelles sont disséquées avec noirceur et poésie. La tension monte au fil des pages, soulevant des questions mais n'apportant pas toujours de réponse. On se laisse embarquer volontiers dans cette histoire qui, sans révolutionner le genre, offre un bon moment de lecture et quelques belles trouvailles stylistiques!
Hélène
Paru en août 2021. Traduit de l'allemand par Sarah Raquillet et Elisa Crabeil. Existe aussi au format numérique.