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Après le très remarqué album Portugal, Cyril Pedrosa nous revient avec un magnifique roman graphique, à l'émotion palpable : Les équinoxes.
S'y croisent des personnages de différents horizons, Louis, Vincent, Camille, autant de destins solitaires en quête d'un sens à donner à leur vie. Louis s'est toujours battu pour des causes qu'il estimait justes, mais décide que le temps est venu de se poser. Vincent, orthondiste, cherche un second souffle après son divorce et renoue contact avec son frère. Camille, jeune femme employée comme ouvrière dans une usine, rompt avec sa vie terne et plaque tout pour photographier le monde qui l'entoure. Un roman graphique polyphonique empreint de nostalgie sur le thème de la solitude, du temps qui passe, du retour à l'essentiel.
Cyril Pedrosa parvient dans ce récit en quatre temps, en quatre saisons aux ambiances bien marquées, à tisser des liens entre ces solitudes égarées avec un talent indéniable et des dessins d'une rare beauté. Lumineux !
Delphine
Octobre 2015
Août 1973, la famille Faldérault s'apprête à partir en vacances dans sa 4L rouge. Mais s'est sans compter le retard de Pierre, paternel de la famille, et dessinateur de bandes dessinées qui doit terminer d'arrache-pied le dessin des planches qu'il a promises à son éditeur. Quand la famille embarque enfin, on relâche enfin la pression et on démarre en trombe dans la joie et la bonne humeur... Cap au Sud, comme chaque année, pour un "bel été" !
Dans ce Road moovie touchant, où défilent les paysages depuis la grise Belgique jusqu'à l'ensoleillée Ardèche, Zidrou et Lafebre nous livrent un portrait sensible de cette famille qui sous le vernis joyeux, cache quelques blessures, quelques égratignures. La tante Lili est très malade, les enfants se disputent, mais surtout, le couple bat de l'aile et sait que ce seront les dernières vacances en famille, sans avoir osé l'avouer aux enfants... Mais sous le soleil du Sud, bien des choses peuvent changer, et la vie semble plus belle, surtout quand on décide de se recentrer sur l'essentiel.
Un album servi par le dessin tout en finesse de Jordi Lafebre et les chatoyantes couleurs qui sentent bon l'été. Une histoire qui a beaucoup de charme et qui vous fera furieusement penser à ces beaux étés de votre enfance.
Delphine
Septembre 2015 - existe aussi en format numérique.
Zeina Abirached est incontestablement douée pour faire vibrer le noir et blanc, le faire vivre sous nos yeux. Elle nous le prouve dans ce roman graphique très réussi et virtuose, où elle nous livre un portrait tout en nuances de son histoire familiale. Un album passionnant qui nous balade entre le Paris contemporain où le lecteur la découvre en jeune artiste Libanaise exilée et le Beyrouth des années 60 de son arrière-grand-père, Abdallah Kamanja, musicien ingénieux et inventeur d'un étonnant piano oriental qui a la particularité de jouer les quarts de tons propres à la musique d'Orient.
Comme l'avait fait l'Iranienne Marjane Satrapi avant elle, dans un Persepolis qui semble avoir inspiré la jeune Libanaise, Zeina Abirached porte un regard tendre et détaché sur l'histoire de sa famille, et sur le Liban d'avant la guerre. On plonge dans l'ambiance de la ville, dans son charme désuet, rétro, on s'amuse de la manière dont l'auteure dessine Beyrouth et se joue des sons et des onomatopées, comme une musicienne.
Son dessin est très graphique, presque géométrique, vraiment ingénieux, absolument unique. Et si ses noirs sont profonds et ses blancs éclatants, c'est pourtant un album tout en nuances et en quarts de tons qu'elle nous laisse découvrir. Car Zeina Abirached est bien une femme à moitié Libanaise, à moitié Française, à moitié francophone, à moitié arabophone, se sentant toujours à la frontière entre la culture d'Occident et d'Orient. Et ce sont ces interrogations sur son identité mixte qu'elle nous livre aussi dans ce roman graphique.
Un album vraiment étonnant à découvrir.
Delphine
Septembre 2015 - existe aussi en format numérique.
Le premier tome de cette série, Fauve d'Or du Festival d'Angoulême en 2015, avait fortement marqué les esprits. C'est donc avec beaucoup d'impatience et pas mal d'émotion que nous retrouvons le petit Riad, enfant de six ans, blond comme les blés, grandissant dans la Syrie d'Hafez el-Assad, dans les années 80. Dans ce récit autobiographique, Riad Sattouf nous décrit son quotidien, dans un petit village près de Homs, entre sa maman bretonne, qui s'acclimate comme elle peut, et son papa syrien, dont l'ambition reste plus que jamais de faire de son fils un Arabe moderne et éduqué, bref, un Arabe du futur. Il y raconte sa première année sur les bancs de l'école, la maîtresse et ses coups de règle, les nouveaux copains, l'art de la débrouille.
Le ton candide de l'enfant contraste avec la violence de ce quotidien plutôt sombre où rien n'y personne n'est épargné : ni le pays, ni ses habitants, ni même son père, qui sont tous croqués par Riad Sattouf avec le même humour corrosif qui avait fait mouche dans le premier tome. Le dessin terriblement expressif rend palpables les personnages et le traitement des couleurs en bichromie nous plonge dans une ambiance particulière. Bref, c'est comme si on y était, en Syrie, en 1984.
Si vous n'aviez pas lu le premier opus, lisez sans hésiter ce deuxième tome, à la fois touchant et percutant. Vraiment incontournable pour les amateurs de bonnes bandes dessinées et pour tous ceux qui veulent découvrir la Syrie avec le regard d'un enfant.
Delphine
Sylvain Savoia, le talentueux dessinateur de la série "Marzi" scénarisée par Marzena Sowa, s'est lancé cette fois en solitaire dans cette belle aventure artistique et humaine qu'a été la création et l'écriture de cette bande dessinée.
Contacté par l'archéologue Max Guérout, il a accompagné plusieurs expéditions montées par l'UNESCO sur le petit îlot des Sables, perdu en plein coeur de l'Océan Indien. Son projet : mettre en dessin l'incroyable histoire de ces esclaves malgaches naufragés puis abandonnés par les blancs en 1761 sur cette petite bande de terre et qui, par leur force et leur courage, ont réussi à y s'adapter et à y survivre pendant quinze ans. Sur base de documentation et aidé par les fouilles effectuées sur place par les archéologues, Savoia nous fait partager avec beaucoup d'humanité la destinée de ces hommes, ces femmes, ces enfants abandonnés dans un tel isolement.
En écho, il nous livre le récit sincère et très engagé de son séjour sur l'île déserte, face à l'immensité de l'Océan, avec pour seule compagnie l'équipe de scientifiques le jour, et les milliers de bernard-l'hermite la nuit. Un vrai journal de bord où l'auteur essaie d'entrevoir ce qu'ont pu ressentir les naufragés au XVIIIe siècle et nous dévoile ses pensées, ses réflexions et ses émotions dans une telle aventure.
Cette bande dessinée, servie par un dessin précis et touchant, est une très belle leçon d'humanité, avec beaucoup de souffle !
Delphine
Assez unique en son genre, cette bande dessinée vous étonnera certainement !
Nous y suivons le destin d'une famille en pleine déliquescence : celle des von Schlitt, aristocrates dont l'heure de gloire appartient déjà au passé et qui tentent de garder la tête hors de l'eau dans une Prusse en pleine mutation en ce début de XXe siècle. Entre un père à la figure imposante, ancien grand cavalier héroïque de Prusse qui laissa une de ces jambes au combat, et la figure absente d'une mère en cure permanente dans un sanatorium en Suisse, les deux jeunes frères von Schlitt tentent de répondre aux exigences d'une famille de haut rang, et de faire honneur à la Tradition, mais chacun à sa manière. Oswald, l'aîné est fonceur et bagarreur, et Ludwig, le second, est rêveur et effacé. A l'école des cadets, ils se feront remarquer pour des raisons différentes et marqueront l'histoire d'une manière tout à fait inattendue... et en changeront le cours.
Avec cette intelligente uchronie, le très inspiré et étonnant auteur flamand Simon Spruyt nous plonge dans cette atmosphère fin de règne et nous décrit avec beaucoup de finesse les errements intérieurs de deux adolescents en pleine quête d'identité. Il parvient aussi avec son dessin à l'aquarelle d'une grande beauté à créer de troublantes ambiances où le lecteur se retrouve immergé avec plaisir... avant la douche froide finale !
Une bande dessinée saisissante à découvrir !
Delphine
Un tout bon roman graphique qui nous fait revisiter "L'Odyssée" d'Homère avec plaisir ! On plonge dans cet univers épique qui n'a finalement pas pris une ride, on s'évade sur l'île d'Ithaque avec de très belles ambiances méditerranéennes, et on redécouvre surtout Ulysse comme un homme à l'intelligence sensible et à la force tranquille, un homme en guenilles avec ses failles, plutôt que comme un héros lisse et poussiéreux.
Le récit est émaillé d'interventions de spécialistes de l'oeuvre d'Homère, autant d'approches qui donnent de la consistance et un ancrage contemporain à ce récit vieux de plusieurs millénaires, et le rendent vivant et passionnant.
On apprécie beaucoup le dessin expressionniste, presque primitif, les belles ambiances, les couleurs chaudes. Bref, de cette lecture, on sort heureux ! Heureux qui comme Ulysse...
Delphine
Chili 1973 : Salvador Allende se suicide dans son bureau du Palais de la Moneda, encerclé par les putchistes du général Pinochet. C'est la fin de l'idéal socialiste d'Allende, le début de la dictature au Chili. Ce roman graphique nous fait revivre à travers les destins de deux militants du mouvement révolutionnaire MIR, Carmen Castillo et son compagnon Miguel Enriquez, tout un pan de l'histoire de ce pays. Depuis les espoirs et les élans des partisans d'Allende, avant et pendant son accession au pouvoir, en passant par le sanglant Coup d'Etat de 1973, jusqu'à la période sombre des persécutions et des tortures des militants par le général Pinochet.
Ce roman graphique nous livre une vision lucide sur une noire période de l'histoire en Amérique latine, mais nous touche surtout par le courage de ces militants, de ces hommes, de ces femmes, qui refusent d'abandonner leurs rêves, qui résistent. A tout prix...
"Vaincus mais vivants" est un témoignage engagé, une très belle réussite graphique, avec une belle ambiance de couleurs.
Un vrai coup de coeur !
Delphine
L'ère de l'égoïsme, comment le néolibéralisme l'a emporté. Un titre qui annonce la couleur sans avancer masqué... Dans ce roman graphique en trois volets, Darryl Cunningham nous raconte ce qui a conduit à la crise financière de 2008.
Dans un premier volet, Cunningham nous raconte la vie et nous expose la pensée d'Ayn Rand, sans cacher son antipathie pour les idées de cette défenseuse acharnée de la liberté individuelle et de la loi du plus fort, tout régulation étatique attirant ses foudres. L'auteur montre aussi l'influence d'Ayn Rand sur certains décideurs d'aujourd'hui aux Etats-Unis.
Vient ensuite une seconde partie dans laquelle se déploient les processus et mécanismes qui ont conduit à la crise des subprimes. Cynisme, cupidité, folie des grandeurs des méga-groupes financiers, qui planent loin au-dessus des réalités de l'immense majorité des "vrais gens". Le dessin donne toute sa force au propos de l'auteur, qui nous laisse tout de même respirer grâce à quelques bons traits d'humour grinçants. Si le sujet est complexe, certaines démonstrations sont d'une limpidité exemplaire, comme celle qui établit le lien entre la gourmandise des groupes financiers et la suspicion devenue généralisée envers les allocataires sociaux, ici à travers l'exemple des contrôles relatifs aux allocations des personnes handicapées en Angleterre.
Dans le troisième et dernier volet, Cunningham développe une comparaison entre les "tempéraments" progressistes et conservateurs, sur base d'une théorie psychologique qui peut laisser perplexe mais qui ne manque pas de faire réfléchir.
C'est ardu mais didactique et plein d'humour. Pour tout qui veut porter un regard lucide sur notre monde, ce livre prêtera à réflexion et à débat, et donne furieusement envie de creuser la question.
Natacha
Sur l'île d'ICI, règne l'ordre et la discipline. Ses habitants mènent une vie on ne peut plus répétitive, entre leurs petites maisons, toute identiques, leurs petits jardins, tout bien taillés, leurs petits chemins, bien calculés, vers leur lieux de travail. Ils y accomplissent des tâches on ne peut plus rassurantes, et tout aussi dénuées de sens que leur vie. Tous y vivent dans un grand calme, le dos soigneusement tourné des rivages qui les entourent et de la mer qui les conduit vers le LA ! Dave, un homme comme les autres, va bien malgré lui semer la zizanie sur l'île... Ou plutôt sa barbe, qui va se mettre à pousser de manière effrénée, au point de sortir de sa maison et de causer dans la ville quantités d'incidents. Mais voici qu'une brèche est ouverte dans l'esprit des habitants impeccables d'ICI. Le désordre est désormais à portée de mains...
Un très fin roman graphique, au délicat dessin au crayon gris, qu'on lit comme une fable burlesque et fantastique. Stephen Collins nous parle avec un humour très flegmatique d'un monde peut-être pas si différent du nôtre et nous donne à réfléchir sur le sens de nos vies.
Delphine
Le talent de Posy Simmonds (Gemma Bovary, Tamara Drewe, mais aussi Le chat du boulanger, album jeunesse) frappe ici les acteurs de la vie littéraire de son humour dévastateur : l'Auteur, l'Editeur, le Lecteur, le Libraire sont croqués sur le vif et sur le gril... Fin, fin, cela se mange sans fin...
Véronique G.
Pascale Bourgaux, excellente journaliste reporter à la RTBF, nous raconte par le biais de cette bande dessinée de qualité, le tournage d'un documentaire au coeur de l'Afghanistan au printemps 2010. Elle nous y livre ses inquiétude sur l'état de ce pays blessé, où les Talibans grignotent petit à petit du terrain et imposent peu à peu leur loi. Une vision lucide sur l'Afghanistan d'aujourd'hui, intelligemment scénarisé par Vincent Zabus, et servi par l'élégant et efficace dessin en couleurs directes de Thomas Campi. A lire !
Delphine
Un tableau par page et, à chaque fois, la phrase qui tue... C'est poétique, c'est drôle, philosophique aussi. Ce sont des évidences décalées faites de mots détournés, qui vont chercher l'enfant qui vibre dans chaque adulte et l'adulte qui dort dans chaque enfant.
Un inclassable, à déguster tout simplement...
Natacha
Ce roman graphique est un coup de poing pour le lecteur, mais aussi un récit intimiste à l'émotion palpable. Plongez dans la vie solitaire et douloureuse de Rosie, jeune adolescente livrée à elle-même au coeur des années 1980. Rosie qui dégringole et se réfugie dans l'alcool et la drogue. Et laissez-vous submerger par le ton, à la fois doux et acéré, de ce récit magnifiquement illustré à l'encre de Chine. Coup de coeur !
Delphine