L'ère de l'égoïsme, comment le néolibéralisme l'a emporté. Un titre qui annonce la couleur sans avancer masqué... Dans ce roman graphique en trois volets, Darryl Cunningham nous raconte ce qui a conduit à la crise financière de 2008.
Dans un premier volet, Cunningham nous raconte la vie et nous expose la pensée d'Ayn Rand, sans cacher son antipathie pour les idées de cette défenseuse acharnée de la liberté individuelle et de la loi du plus fort, tout régulation étatique attirant ses foudres. L'auteur montre aussi l'influence d'Ayn Rand sur certains décideurs d'aujourd'hui aux Etats-Unis.
Vient ensuite une seconde partie dans laquelle se déploient les processus et mécanismes qui ont conduit à la crise des subprimes. Cynisme, cupidité, folie des grandeurs des méga-groupes financiers, qui planent loin au-dessus des réalités de l'immense majorité des "vrais gens". Le dessin donne toute sa force au propos de l'auteur, qui nous laisse tout de même respirer grâce à quelques bons traits d'humour grinçants. Si le sujet est complexe, certaines démonstrations sont d'une limpidité exemplaire, comme celle qui établit le lien entre la gourmandise des groupes financiers et la suspicion devenue généralisée envers les allocataires sociaux, ici à travers l'exemple des contrôles relatifs aux allocations des personnes handicapées en Angleterre.
Dans le troisième et dernier volet, Cunningham développe une comparaison entre les "tempéraments" progressistes et conservateurs, sur base d'une théorie psychologique qui peut laisser perplexe mais qui ne manque pas de faire réfléchir.
C'est ardu mais didactique et plein d'humour. Pour tout qui veut porter un regard lucide sur notre monde, ce livre prêtera à réflexion et à débat, et donne furieusement envie de creuser la question.
Natacha