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On retrouve avec grand plaisir toute la délicatesse de cette autrice islandaise dans ce cinquième roman traduit en français. Olafsdottir n’a pas son pareil pour illuminer la noirceur de son propos, puisqu’il s’agit ici du dernier voyage d’un homme de 49 ans qui a décidé d’en finir avec la vie, n'ayant plus aucune femme dans sa vie (son ex-femme l'a quitté 8 ans auparavant, sa fille vole de ses propres ailes et sa mère est à l'hospice; toutes trois prénommées Gudrun). On suivra donc, d’abord avec inquiétude, puis très vite avec empathie, le voyage entrepris par Jonas Ebeneser dans un pays ravagé et traumatisé, emportant avec lui quelques outils dont sa fidèle perceuse et devenant le locataire inhabituel de l’Hôtel Silence, dirigé par un couple frère/soeur, rescapé d’une guerre jamais nommée.
De même que dans Rosa Candida, Audur Ava Olafsdottir parvient à aborder ici des sujets difficiles - le suicide, la solitude, les cicatrices accumulées au fil du temps - avec légèreté et poésie et c’est bien là que réside toute la force et l’humanité de son écriture. Une histoire lumineuse, simple et tendre, qui (re)donne foi en l’humanité !!
Catherine D.
Paru en octobre 2017. Existe aussi en format numérique.
Bernard Cosey, grand nom de la bande dessinée récompensé pour son oeuvre par le festival d'Angoulême en janvier 2017, signe un roman graphique assez unique : il délaisse dans cet album les couleurs qui lui sont chères pour nous livrer un récit lumineux en noir et blanc. Si l’exercice de style est très réussi (quelles magnifiques planches il nous donne à découvrir !), c’est surtout la qualité des ambiances et la fine description des relations entre les personnages que le lecteur pourra apprécier. Il y est question de retrouvailles entre deux amoureux de jeunesse, Gus, ouvrier soixantenaire, et Georgia Gould, ancienne étoile du cinéma hollywoodien, revenue en Suisse pour se soigner. Et de faux kidnapping orchestré par les anciens amants. Le tout sur fond de décor des Alpes suisses que Cosey connaît et dessine si bien. Un récit intime et très juste, touchant. Une nouvelle démonstration du talent de Cosey, de sa virtuosité et de sa capacité à se renouveler en créant de nouvelles formes graphiques. Excellent !
Delphine
Paru en octobre 2017. Existe aussi en version numérique.
En ce début de XXIe siècle, aussi surprenant que cela soit, il existe encore des zones de notre planète qui sont encore à l’état sauvage et non « domptées » par l’homme. Si ce dernier a toujours voulu dominer la nature depuis la nuit des temps, jusqu’aux excès qu’on connaît aujourd’hui, il a aussi été fasciné par la puissance des éléments et la beauté du monde sauvage, qu’il a exploré avec passion. Dans son atlas recensant 45 territoires de notre planète qui ont échappé au contrôle de l’être humain, Christ Fitch, journaliste britannique pour la revue Geographical, nous rappelle les rapports étroits et ambigus qu’il existe entre l’homme et la nature. Nous voyageons d’un continent à l’autre, découvrons des terres sauvages et indomptées : territoires hostiles jamais habités, zones abandonnées par la civilisation où la nature a repris ses droits, terres encore vierges. Nous découvrons l’histoire de ces lieux et les explorons à travers de très belles cartes, des photographies. Tous ces territoires, parfois méconnus, méritent qu’on y fasse halte pour les admirer et nous questionner sur l’importance de la nature sauvage pour notre planète et pour l’humanité. Un bel ouvrage qui nous invite au voyage et à réfléchir à notre rapport à la nature.
Delphine
Paru en octobre 2017.
Ce livre magnifique présente de façon quasi exhaustive le travail monumental réalisé pendant près de 70 ans par Ettore Sottsass, ingénieux et brillant architecte et designer né en Autriche d’un père italien et d’une mère autrichienne. L’ensemble de ses différents travaux en photographie, design industriel, céramique, bijouterie, mobilier divers, architecture, etc., est illustré par de nombreuses photographies, images, fac-similés de dessins de l’artiste, et présenté selon un découpage qui suit chronologiquement les grandes période de sa vie créative, en regard de ses multiples collaborations et expositions à travers le monde.
Un must pour tout amateur de design et de belles idées créatives !
Catherine D.
Paru en août 2017.
Bernadette Murphy, historienne irlandaise expatriée dans le sud de la France, a mis 7 ans pour élucider le mystère de l’oreille coupée de Van Gogh et de l’identité de la jeune femme à laquelle il a offert sa propre chair... Elle nous emporte dans une enquête minutieuse et passionnante qui va nous plonger dans le quotidien des habitants de la ville d’Arles à la fin du 19ème siècle, ainsi que dans les archives détenues et parfois oubliées des bibliothèques américaines et européennes. Que s’est-t-il passé cette fameuse nuit du 23 décembre 1888 ? Gauguin est-il responsable de cet acte ou est-ce la seule folie du peintre néerlandais qui est en cause ? La mutilation que l’artiste s’est infligée concerne-t-elle l’oreille entière ou seulement une partie ? Qui est cette jeune femme qui s’est évanouie à la vue de ce présent pour le moins étonnant ?
Toutes ces questions ont trouvé réponse grâce à l’acharnement sans faille de Bernadette Murphy, qui nous comble de précieux détails et de nombreux documents d'archive permettant de comprendre petit à petit, comme si nous y étions, la chronologie de cette funeste nuit... Remarquable et captivant !
Catherine D.
Paru en octobre 2017.
Quel bonheur de retrouver le style et l’écriture de cet auteur que nous admirons, au service de l’Art ! Consacrées à des artistes plasticiens, dont une majorité français, les chroniques de Barnes nous emmènent dans un voyage ludique et érudit à la découverte des histoires entourant une toile spécifique d’un peintre (“Le radeau de la méduse” de Géricault ou “L’Exécution de Maximilien” de Manet) ou l’ensemble de son oeuvre. Il nous propose surtout de revisiter nos connaissances de ces artistes célèbres, à force d’anecdotes plus ou moins connues, et de recontextualiser le travail et les relations existantes entre ces différents artistes (Delacroix ayant par exemple posé pour Géricault ou encore le “Daed Dad” de Ron Mueck comparé à la “Vénus ataxique” du médecin Paul Richer).
On traverse l’histoire de l’art l’air de rien, comme une longue promenade qui éveille les sens, suivie d’un repos bien mérité au coin du feu avec une délicieuse tasse de thé... Raffiné!
Catherine D.
Paru en octobre 2017. Existe aussi en format numérique.
L'auteur d'Au départ d'Atocha et de 10:04 (délicieux, intello et très drôle), deux romans traduits aux éditions de l'Olivier en 2014 et 2016, est décidément, comment dire? un auteur pour lequel on aimerait trouver un mot neuf, un mot qui ne serait qu'à lui, un mot qui le qualifierait et ne pourrait qualifier personne d'autre. Ce mot ne serait pas le mot "virtuose" (trop pompeux) ni le mot "drôle" (trop gras) ni encore les mots "subtil", "fin", "incroyablement talentueux", "brooklynesque" (une sorte de fils caché qu'auraient eu ensemble Paul Auster et Woody Allen)... mais un peu de tout ça. Pourquoi pas tout simplement "parfait" ?
La haine de la poésie est un texte à l'humour ultra-fin qui évoque à merveille la poésie, la place qu'elle occupe dans notre société. Ce n'est pas tout à fait un coup de gueule, peut-être un cri d'amour désespéré pour un genre qui, par sa nature même, s'extrait du monde réel et s'en fait oublier pour mieux le dire en contrepoint.
J'ai adoré ce texte qui m'a donné envie de mieux défendre les poètes et leurs livres, et que je relirais volontiers.
Notons qu'il est publié dans une collection qui gagne à être connue aux éditions éditions Allia.
Natacha
Jérusalem, c’est non seulement l’histoire, sur plusieurs générations d’hommes et de femmes, de la famille Vernall-Warren, dont on découvre Michaël et sa soeur Alma à notre époque, c’est également l’histoire du quartier populaire des Boroughs, Southampton, petite ville située à une centaine de kilomètres au nord de Londres, du Moyen Age jusqu’aux années 2000.
Rédigé en dix ans par Alan Moore, le scénariste de BD “The Watchmen” ou encore “V pour Vendetta” pour n'en citer que quelques-unes, Jérusalem est bien plus qu’une histoire impossible à résumer. C’est un chef d’oeuvre littéraire qui brasse tous les genres et toutes les époques en un récit foisonnant, profond, métaphysique où le fantastique saupoudre le tout, tandis que la dimension temporelle devient elle-même extensible et physique. On y rencontre des toxicomanes, des artistes et des Maîtres Bâtisseurs; on y côtoie Cromwell, Lucia Joyce ou encore Becket; on y perçoit la folie comme une malédiction héréditaire; on y déambule aussi bien dans la “réalité” entendue communément avec son lot de faits sordides, que dans l’En-Haut, le royaume des morts et des enfantômes; et on y lit une langue virtuose, magnifiquement traduite par Claro, qui donne une tonalité différente à chacun des chapitres, l’un sera entièrement écrit en vers, un autre sans ponctuation ou presque, ou encore un chapitre entier écrit dans une langue totalement inventée et malgré tout compréhensible... Alan Moore offre une magnifique déclaration d'amour à sa ville de Northampton dont il se sent le gardien et qu'il considère comme étant le centre du monde.
Il serait vain de vouloir résumer ce pavé de près de 1300 pages à des généralités, mais voici un roman gigantesque, où l’on ne s’ennuie pas une seule seconde et qui remet en perspective notre propre appréhension du monde. Brillant !!
Catherine D.
Paru en août 2017. Traduit de l'anglais par Claro. Existe aussi en format numérique.
Toujours sur le thème des inégalités (ses deux premières BD publiées en français chez le même éditeur étaient résolument féministes), Liv Stromquist s'attaque cette fois à l'économie. Le capitalisme sans limite et l'hyper-richesse sont mis en question dans ses dessins pleins d'humour et très expressifs. Cet ouvrage permet également d'interroger notre façon de lutter contre les systèmes d'oppression, et de passer par la même occasion un excellent moment de lecture!
Hélène
Paru en octobre 2017
Jean-François Flamey est autodidacte, il aime questionner l'image, ses images, et créer ainsi de nouvelles interprétations, de nouvelles histoires, de nouveaux regards. Son travail photographique est le résultat de prises de vue brutes, en numérique ou argentique (il affectionne les Polaroid), sans retouches ou au contraire soumises à des manipulations diverses : imprimées une première fois, plongées dans des bains de produits mordants ou des colorants, collées sur des papiers glanés de ci de là, mises en culture au fond d’une cave humide ou à même la rue au gré du temps qui passe et de celui qu’il fait… Le résultat est ensuite (re)photographié ou scanné avant d’être imprimé à nouveau, offrant ainsi une autre lecture de l'image initiale. Ici, la photographie est désacralisée et la matière parle autant que la représentation de son contenu. Non Dits, sa première et remarquable monographie, par la qualité d'impression et le choix des images, exprime à merveille l'univers particulier et fantasmagorique de Jean-François Flamey, révélant les ratages et les dérapages des images qui permettent au lecteur de laisser l'imaginaire faire son oeuvre et de réinventer sa propre lecture photographique.
Catherine D.
Paru en septembre 2017.
Quel beau premier roman! Dans Faux départ, on découvre une vrai plume, touchante, acerbe, piquante, teintée de jeunesse mais aussi déjà mature.
Aurélie, héroïne de ce roman, est à l'aube de sa vie adulte. Elle décode déjà fort bien les mécanismes de la société française qui rendent difficile son ascension sociale malgré le discours politique qui promeut l'égalité des chances. Aurélie vient en effet d'une famille ouvrière. On la suit dans ses études, ses petits jobs, ses errances, ses amours, ses galères... D'autres beaux personnages jalonnent ce livre : Alejandro, exilé colombien idéalisant son pays d'origine tout en ne voulant pas y retourner malgré la dureté de sa vie en France; Franck, quadra en mal d'amour; Benjamin qui semble apporter un peu de sérénité dans la vie d'Aurélie.
L'auteur nous livre aussi un portrait terriblement juste (et parfois cruel) de Paris aujourd'hui. C'est un roman à la fois intime et urbain, qui se lit avec fluidité. Une auteur à suivre.
Catherine M
Paru en septembre 2017. Existe aussi en format numérique.
Franz était enfant dans Abraham et fils, le voici adolescent dans Les histoires de Franz. Toujours observateur candide et lucide des années 60-70 dans la petite ville française imaginaire de Tilliers. Tilliers qui ressemble à Pithiviers.
Toujours avide de comprendre ce qui se passe autour de lui, il nous aide à comprendre les mouvements qui traversent ces années où l'émancipation, dans tous les domaines, est en ébullition.
Son papa, Abraham, devient directeur de la maternité. La nouvelle femme d'Abraham, Claire, crée avec deux amies un cercle pour informer les femmes sur la sexualité. Franz grandit et se trouve lui aussi confronté aux médecins, comme patient. On retrouve donc les thèmes chers à Martin Winckler : le soin, la médecine, la santé, l'autonomie. Et comme à chaque fois, l'auteur nous emporte dans son enthousiasme et dans une trame romanesque efficace, fluide, convaincue et convaincante.
On voudrait faire partie de cette famille où l'amour circule, on voudrait faire corps avec les enthousiasmes des personnages dans cette époque de découverte des libertés...
Ne boudez pas votre plaisir, rencontrez Franz et ses histoires qui sont aussi les histoires de France, avec le regard engagé et singulier que Martin Winckler, didactique et chaleureux, porte sur elles.
Vous pouvez rencontrer Martin Winckler à la librairie le lundi 23 octobre à 19h30. La soirée sera suivie d'une séance de dédicaces et d'un verre de l'amitié.
Valentine Goby, on la connaît pour ses romans (notamment Kinderzimmer et Un paquebot dans les arbres, édités par Actes Sud). Ici, elle nous plonge dans l'univers de Charlotte Delbo, écrivaine française, engagée dans la résistance et qui a vécu dans différents camps de concentration. Elle sera libérée à la fin de la guerre et écrira toute une série de romans relatant le vécu dans les camps. Elle meurt en 1985.
Charlotte Delbo fait partie des auteurs de littérature concentrationnaire, au même titre que Primo Levi, Imre Kertész et beaucoup d'autres. Elle sera pourtant longtemps méconnue du grand public. Est-ce parce qu'elle était une femme? Est-ce parce qu'elle semble avoir été heureuse après la guerre? Valentine Goby s'interroge sur ce personnage, sur sa vie après les camps, sur ce que la littérature permet pour survivre à ce genre de tragédie.
Je me promets d'éclatantes revanches est donc un essai littéraire mais se dévore comme un roman. En effet, on est aussi emporté dans l'enthousiasme de l'auteur vis-à-vis de cette femme étonnante. On chemine avec elle à la découverte de Delbo. Une petite pépite qui nous parle des pouvoirs des mots.
Catherine M
Paru en septembre 2017, existe aussi en format numérique.
A la suite d'une rupture affective qui le plonge lentement dans la dépression, l'auteur se voit conseiller une psychanalyse. Rapidement, le psychanalyste l'interroge sur ses parents et révèle des failles, des manques dans la structure familiale. Investi d'une nouvelle mission qui l'éloigne du souvenir douloureux de sa fiancée, Renato Cisneros va alors fouiller dans son passé familial et surtout celui de son père, Luis Cisneros Vizquerra, général militaire surnommé El Gaucho, mort d'un cancer une vingtaine d'années auparavant.
"Tout comme un père n'est jamais préparé à enterrer un fils, un fils n'est jamais préparé à déterrer son père", c'est avec ces mots que l'auteur clôt son roman, consacré à cette figure paternelle aimante, mais stricte et secrète. Le récit de son histoire familiale se transforme peu à peu, au fil des découvertes et des rencontres avec des personnes ayant connu El Gaucho, en une histoire nationale où la personnalité du père se révèle bien plus contrastée et fortement liée aux événements historiques qui ont jalonné l'histoire du Pérou et des pays voisins... Ce père dictateur fut en même temps amoureux des femmes, militaire exemplaire, opposant au régime, ministre de l'intérieur, ministre de guerre, poète à ses heures, ami et fervent admirateur de Pinochet et Videla, féru de littérature, mais insensible aux tortures infligées à son peuple...
Il aura fallu beaucoup de courage et de ténacité à Renato Cisneros pour écrire ce roman particulier, qui navigue entre sphère privée et sphère publique et qui livre le portrait troublant d'un homme que l'on voudrait détester, mais auquel on s'attache paradoxalement. "La distance qui nous sépare" est un roman passionnant et émouvant, tant on en apprend sur l'histoire récente du Pérou tout autant que sur la relation difficile entre un père et son fils.
Catherine D.
Paru en août 2017, disponible aussi en format numérique.
Shell, du nom du blouson qu'il porte toute la journée (et parfois la nuit) sur le dos, est un garçon de douze ans, un ado pas encore ado et pas tout-à-fait comme les autres. Shell est différent, il a d'ailleurs quitté l'école. Il aime les tâches simples, répétitives, mais il a surtout envie de devenir un homme. Et un homme, ça fait la guerre. Alors, quand il entend ses parents, propriétaires de la station service où Shell est heureux de rendre de menus services, discuter un soir de son cas, il prend une grande décision pour ne pas être envoyé dans une institution qui, il en est sûr, ne lui conviendra pas. Il va partir à la guerre, là-haut, de l'autre côté de la colline et démontrer à ses parents qui il est vraiment! Mais de l'autre côté de la colline, c'est une autre surprise qui attend le jeune homme, c'est la plus belle rencontre de sa vie, il va découvrir sa Reine, une jeune fille qui va l'emporter dans un monde fantasque et imaginaire qui lui assurera confiance et sécurité, malgré la vie précaire qu'il va finir par mener...
C'est un roman tout en douceur, empreint de poésie dans son écriture et dans son esprit. C'est une ode à l'imaginaire, à la liberté, à la différence. Un roman qui parle d'apprentissage de la vie, avec le regard d'un enfant qui s'endort quand l'angoisse ou l'émotion est trop forte, ou encore un enfant qui continue de croire aux contes de fée, malgré la dureté de la vie réelle. Un conte initiatique, tout en sensibilité.
Catherine D.
Paru en août 2017, existe aussi en format numérique.
Gros coup de cœur pour ce roman, dur mais magnifique.
Nous sommes quelques mois avant la fin de la seconde guerre mondiale. Pearl et Stasha sont des jumelles âgées de onze ans, qui au début du livre arrivent à Auschwitz avec leur mère et leur grand-père. Leur gémellité attire l'attention de Josef Mengele, officier SS et médecin du camp. Il a rassemblé les jumeaux et les triplés déportés dans son zoo et leur fait subir de terribles expérimentations médicales.
Pearl et Stasha racontent, en alternance, le quotidien au zoo, les personnes qu'elles y rencontrent et les séances avec celui qui se fait appeler Oncle et ses assistants. À la libération, les prisonniers survivants, en grande majorité des enfants, se mettront en route pour essayer de retrouver leurs familles ou un semblant d'espoir de recommencer une vie normale.
Mischling ("bâtard", en allemand) est un livre violent par moments, poignant, écrit dans une très belle langue, avec un beau travail de documentation en arrière-plan. Il ne laissera personne indifférent.
Hélène
Paru en septembre 2017, existe aussi en version numérique.
Razan Zaitouneh est une avocate syrienne militante des droits de l'homme. Elle a disparu depuis décembre 2013, enlevée avec trois autres militants. Justine Augier, qui vit à Beyrouth, fascinée par la figure de Razan, s'est lancée dans l'écriture d'une sorte de biographie basée sur des archives et de nombreux témoignages de ses proches. Et cela a donné naissance à ce magnifique récit, De l'ardeur, qui nous plonge dans la Syrie contemporaine.
Au delà de la portée politique et historique de cet ouvrage, c'est aussi un portrait de femme étonnant qui nous est livré. Razan Zaitouneh est (était?) une femme engagée, militante, dotée d'un caractère fort. Elle va s'intéresser tout particulièrement aux conditions de détention carcérale et se fera beaucoup d'ennemis en dénonçant les mauvais traitements subi par les prisonniers, les problèmes de procédure, d'injustice dans le système judiciaire syrien. Elle sera d'ailleurs suspendue du barreau à la demande d'un juge qu'elle avait mis sous pression dans un dossier.
Justine Augier s'est plongée dans la vie de Razan pendant deux ans, visionnant des archives, interrogeant ses proches, lisant des articles. Elle nous raconte aussi ce travail et le pourquoi de sa démarche. Elle parvient, au fil du récit, à nous entraîner dans son entreprise. On s'attache à ces deux femmes (Razan Zaitouneh et Justine Augier) qui vivent au coeur d'une région du monde secouée de toutes parts depuis de trop nombreuses décennies. Et on espère nous aussi, lecteurs, que Razan est toujours en vie.
Catherine M
Paru en août 2017, existe aussi en format numérique.
Cora, née esclave dans une plantation de coton, réservée mais déterminée, porte en elle un instinct de vie et d'insoumission qui font vibrer ce roman de la première à la dernière page.
Marquée par l'évasion de sa mère, sans elle, quand elle était enfant, Cora s'enfuit avec Caesar de la plantation des Randall en Géorgie quelques années plus tard, toute jeune adulte. Aidée par le chemin de fer clandestin, elle connaîtra la Caroline du Sud condescendante, la Caroline du Nord exterminatrice, elle traversera le Tennessee dévasté, entreverra dans l'Indiana la liberté et la solidarité.
Ce roman terrible rejoint la liste des magistrales dénonciations de l'esclavage, porté dans certains états au rang de meurtre de masse, sans compter les tortures inhumaines pratiquées ailleurs.
Le lumineux personnage de Cora nous permet de garder les yeux ouverts tout au long de ce périple qu'on lit avidement et qui nous rappelle jusqu'où l'être humain peut aller quand il a décidé de dominer ses semblables en les classant dans la catégorie "les autres".
Ce roman, le sixième de Colson Whitehead, a tout simplement reçu le prix Pulitzer en 2016...et le National Book Award, et un immense succès aux États-Unis.
Natacha
Paru en août 2017. Traduit de l'américain par Serge Chauvin. Existe aussi en format numérique.
Dès les premières pages, on sait qu'il y aura un drame, un terrible drame, on sait lequel et on relit les quelques lignes qui l'annoncent l'air de rien, comme un inoffensif constat, on les relit pour être sûr de bien comprendre. Mais les détails, les causes, les étapes, la sourde obstination qui conduira vers cette issue, ne sous sont révélés que lentement, par petites touches, avec toute l'opacité qu'ils gardent aux yeux de la jeune narratrice.
Ladite narratrice habite en bordure d'un lac et devient la baby-sitter du petit garçon qui vit sur l'autre rive. Elle devient proche de la jeune maman, passe de plus en plus de temps dans la maison d'en face.
Une histoire des loups nous plonge dans la forêt, on y navigue en canoë, on y ramasse des cailloux, on y touche des épines de pins, la nature est présente et palpable, on en respire même l'odeur. C'est une des marques de fabrique de l'éditeur Gallmeister. On y plonge aussi dans une petite ville américaine et dans quelques facettes de ces États-Unis si souvent dépeints sans ménagement par leurs propres écrivains : la tolérance de la Justice d'état à l'égard des sectes, le pudibonderie de cette même Justice dans d'autres domaines. Une des questions qui traversent ce roman plein de mystères et de suggestivité est celle de la culpabilité.
Arrivée à la dernière page, j'avais envie de recommencer le livre pour comprendre à nouveau, ou essayer...
C'est un roman hypnotique, en miroir à l'engourdissement de la narratrice face à ses voisins si ordinaires et si secrets.
Natacha
Paru en août 2017. Traduit de l'américain par Juliane Nivelt. Existe aussi en format numérique.
Olivier Nasti, Meilleur Ouvrier de France 2007, est depuis plus de quinze ans le chef du restaurant doublement étoilé Le 64° et le propriétaire de l’hôtel cinq étoiles attenant, Le Chambard. Si l’Alsace est au cœur de sa cuisine qu’il définit comme « un formidable moyen d’expression et de transmission », Olivier Nasti apporte des saveurs plus exotiques à des plats typiquement alsaciens et réciproquement. Cuisine classique et technique, Olivier Nasti revisite les plats traditionnels de la grande cuisine française pour en révéler toute leur délicatesse et leur raffinement, et offrir une expérience à vivre pour l’heureux convive. Grand amateur de pêche, de chasse et de cueillette, cet ouvrage remarquable épouse ses centres d’intérêt en proposant cinq parties : Territoire (Lobe de foie gras poché au vin rouge, pistaches, pommes et oignons), Nature (La courgette trompette cuite entière, oignons caramélisés, flan de cresson et homard bleu cuit au beurre salé), Chasse (Faisan, sauce choucroute), Technique (Pigeon sauce salmi, tagliatelles de céleri) et Desserts (La noisette et le citron). Essentiel et réjouissant !
Catherine D.
Paru en juin 2017.
Avec ce nouveau traité consacré à la bière, les éditions Rustica offre à l’amateur et à l’apprenti brasseur les bases pour comprendre le processus à l’oeuvre dans la fabrication de cette boisson dont la trace la plus ancienne remonte aux Sumériens, 4000 ans avant JC. C’est dire à quel point la bière est un symbole; elle se retrouve partout et en toute occasion, et le registre de ses saveurs semble infini. A l’origine réservé aux femmes, le brassage de la bière n’aura plus de secrets pour les passionnés de ce breuvage après la lecture de cet ouvrage très documenté qui propose en outre de nombreuses recettes “pure bière” comme le Bavarois de bière aux myrtilles et des “recettes incontournables à la bière” telle la traditionnelle Carbonnade à la bière ou encore les Truites pochées à la flamande. A savoir : loin devant le vin, la consommation annuelle mondiale de bière est la plus élevée après le thé !
Catherine D.
Paru en mai 2017.
A l’échelle mondiale, le pain est un élément essentiel de notre alimentation. Quel bonheur dès lors de se plonger dans la lecture de ce très bel ouvrage, destiné avant tout aux professionnels qui souhaiteraient développer leur savoir-faire et parfaire leur technique! Signée par trois professionnels de la boulangerie, Thomas Marie (Meilleur Ouvrier de France), Jean-Marie Lanio et Patrice Mitaillé, la centaine de recettes proposées ici reflète leur envie commune de partager et transmettre leurs connaissances, l’exigence du métier et la fantaisie indispensable pour se réinventer. Outre la fabrication d’un levain dur ou liquide, les recettes sont réparties en six grandes thématiques : Pains régionaux, Pains du monde, Pains spéciaux, Brioches et classiques français, Brioches du monde et Douceurs boulangères. Avec sa photographie soignée et appétissante, voici un incontournable en la matière!
Catherine D.
Paru en juin 2017.
Gros coup de cœur. Pierre, qui s'était juré de ne jamais retourner en centre psychiatrique, fait une nouvelle crise et y est interné une seconde fois. Pierre est bipolaire et a arrêté de prendre ses médicaments. Le livre traite donc en partie de cette maladie, de son séjour dans le centre, des "branleurs de médecins" mais également du mal-être de ce jeune étudiant brillant qui est monté à Paris de son Ardèche natale, qui y est devenu journaliste (de gauche, lutte des classes oblige) et y a épousé une fille de la grande bourgeoisie parisienne (petite fille ou nièce de Paul Claudel, je ne sais plus...). Le style est tranchant et incisif et colle parfaitement au personnage de Pierre, cet écorché vif qui va devoir accepter sa maladie, mais qui va aussi aussi découvrir que les histoires que l'on raconte (ou que l'on tait) de génération en génération ne sont pas toujours vraies et qu'on n'en est pas les dépositaires éternels. Très beau personnage du père de Pierre...
Grégory
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Olivier Chantraine créa Serge Horowitz. Et il vit que cela était bon.
Personnage haut en couleurs, Serge Horowitz incarne l'image du quarantenaire à qui rien n'a jamais réussi, toujours en recherche d'un sens à sa vie : adepte du moindre effort, de la procrastination, vivant aux crochets de sa soeur dont il squatte l'appartement, hypocondriaque, et atteint de troubles d'aphasies chroniques qui lui font perdre toute capacité de parole à des moments de stress plus aigu, il est employé depuis de longues années par l'Offshore Investment Company, un cabinet de consulting international implanté à Paris. Et cela, grâce au concours de son frère, François, Ministre des Finances.
Et pourtant Serge Horowitz n'en est pas moins un personnage des plus sympathiques auquel le lecteur ne pourra que s'attacher. Au fil de nombreuses mésaventures et déconvenues décrites avec force humour par un auteur très inspiré, nous découvrons que Serge est aussi un homme de bon sens et d'idéaux. Lorsqu'il fait capoter le rachat d'une petite entreprise française par une société japonaise, pour avoir dit tout haut ce qu'il pensait de l'honnêteté de ce contrat, son frère, qui semble étonnamment lié à cette affaire, le somme de rattraper son erreur. Et vite fait. Mais Serge Horowitz a choisi la voie de la vérité, et non de la réussite sociale et professionnelle, et fera preuve d'une grande indépendance d'esprit. Il devient "un élément perturbateur", au désespoir de son ambitieux et peu scrupuleux frère qui vient d'annoncer qu'il se présentait aux élections présidentielles, et ne compte pas laisser son cadet entacher sa réputation.
Voici une satire sociale de notre société occidentale qui se savoure. Une comédie rythmée qui nous fait rire par ses dialogues acérés, le burlesque de certaines situations décrites, la modernité de son ton, totalement décalé.
Un moment de lecture jubilatoire !
Delphine
Paru août 2017. Existe aussi au format numérique.
Génialissime, original, littérairement travaillé ; voilà une histoire de piraterie et de chercheurs d'or qui sort de l'ordinaire. En effet, dès les premières pages, le récit du naufrage imaginaire du bateau du pirate Henry Morgan (1635-1688) capte notre attention et nous entraîne dans une contrée sauvage et mystérieuse, à la nature luxuriante.
Le roman, teinté de réalisme magique, nous présente auprès de personnages hauts en couleurs, originaux, dotés de caractères bien trempés. Plusieurs d'entre eux cherchent trois siècles plus tard le mystérieux trésor que l’équipage du capitaine Morgan aurait abandonné dans une région désormais agricole où la culture de la cane à sucre et le commerce du rhum ont fait la fortune de certains. Mais la richesse, la découverte de ce trésor, fera-t-elle leur bonheur ?
Le titre "Sucre noir" est une évocation au pétrole. Le Vénézuela (où l'auteur a vécu de nombreuses années) est en effet riche en pétrole, cela a-t-il fait pour autant le bonheur des citoyens de ce pays ? Rien n'est moins sûr. Et si cette découverte n'était pas à l'origine de leur perte justement ?
Avec ce roman d'aventures, Miguel Bonnefoy dresse une sorte de fable philosophique entraînante. Un auteur à découvrir assurément, qui sera présent à la librairie le mardi 28 novembre à 19h30 pour une rencontre qui s'annonce passionnante!
Catherine M
Paru en août 2017, existe aussi au format numérique.