« Je mapel silence é je sui genti ». C’est par cette première phrase que les lecteurs du magazine (A Suivre) découvrent, ébahis, le récit de Comès en février 1979.
Silence, c’est une chronique rurale ayant pour cadre les Ardennes belges. Elle met en scène le personnage de Silence, un simplet muet, l’idiot du village, travaillant pour son maître, Abel Maury, ou plutôt exploité par lui et l’ensemble du village qui lui refilent toutes les tâches pénibles.
Cette œuvre nous parle de campagnes, de prés, de fermes mais aussi de rivalités, d’envie, de jalousie, de l’âpreté du gain. De sorcellerie aussi.
C’est avant tout la marginalité qui est mise en avant, la différence, au travers des personnages du muet, des nains, des gitans. Comès disait de Silence qu’il était le reflet des problèmes dont on ne parle jamais, de tous les problèmes que peuvent rencontrer les gens qui n’entrent pas dans le moule où l’on voudrait que tout le monde rentre.
Silence est l’ode de la poésie sourde et dérangeante, oscillant entre cruauté insoutenable et innocence candide, entre l’étude sociale et la fable rurale.
Silence est l’œuvre magistrale de Comès. La magie qui s’en dégage, l’élégance, la lenteur font aussi, sans conteste, de Silence l’un des récits majeurs de la bande dessinée et l’un des éléments fondateurs de ce que nous nommons aujourd’hui le « roman graphique ». A ces titres, il se devait d’inaugurer notre sélection de classiques à découvrir, à lire, ou à relire.
Prix du meilleur album à Angoulême en 1981. Existe aussi dans une version anniversaire à 12.00€.
Olivier C.