Ivan Jablonka signe un magnifique récit, à la frontière de plusieurs genres, pour rendre toute sa dignité à une jeune fille de 18 ans assassinée près de Pornic en janvier 2011.
Sous la photo de Laëtitia placardée d'abord comme avis de recherche puis comme illustration de nombreux reportages après la découverte de son corps, les mots sont terribles : coups, viol, meurtre, démembrement. L'histoire racontée l'est tout autant : placée avec sa sœur jumelle d'institutions en foyers,elle a perdu des parents qui ne sont pas parvenus à les protéger, elle et sa sœur, ni d'eux-mêmes ni des autres.
Ivan Jablonka, écrivain mais aussi historien, va rendre la parole, redonner la place qui lui revient à Laëtitia, à travers ses textos, ses commentaires sur les réseaux sociaux mais aussi grâce aux témoignages de ses proches, sa sœur, son père , son parrain, ses amis.
Le portrait qui se dessine est celui d'une jeune fille, bien sûr fragile, mais aussi et surtout d'une amoureuse de la vie qui s'en sortait de mieux en mieux: travail stable, amis, amours. D'elle,la France a beaucoup entendu parler parce qu'elle incarnait ce terrible sort fait aux femmes, se faire frapper, se faire violer, se faire tuer mais aussi parce que le Pouvoir, avec une majuscule, mais toujours celui des hommes, a choisi de faire de ce sort un exemple de laxisme des magistrats : son assassin est un récidiviste que la Justice n'a pas gardé sous les verrous. Nicolas Sarkozy a dénoncé avec force le manque de sévérité , engrangeant ainsi les opinions favorables des tout sécuritaires.
Laëtitia était tellement plus complexe, plus subtile, plus vivante que tous ces clichés, merci à Ivan Jablonka de nous l'avoir rendue si proche...
Véronique Gillion (ancienne libraire, toujours lectrice)
Paru en septembre 2016 - existe aussi en format numérique.